Logo

Auteur :
Patrick Ph. Streiff

Article :
Le méthodisme francophone :
aperçu historique et bibliographique


Tiré de :
John Wesley : Actes du colloque à l'occasion du tricentenaire de la naissance du fondateur de méthodisme.
Faculté de Théologie de l'Université de Lausanne, 12-13 juin 2003.

© Editions du CMFT, Lausanne, 2003



Introduction

Dans le cadre du Centre Méthodiste de Formation Théologique, créé en 1988, et de sa bibliothèque, j’ai commencé à collectionner des ouvrages et de faire des recherches dans l’histoire du méthodisme en Europe francophone. Au début, il n’y avait que trente ou quarante titres méthodistes en français dans la bibliothèque. Après quinze ans, ce fonds a atteint une centaine d’ouvrages majoritairement anciens. S’y ajoutent des périodiques et des procès-verbaux des Conférences Annuelles (synodes). Grâce à la possibilité de consulter à distance, par Internet, les fonds des bibliothèques nationales en Suisse, France et Belgique, il est devenu plus facile de se faire une idée assez complète de ce qui a été publié et conservé par et sur les méthodistes. Dans mes recherches bibliographiques je viens de récolter des données sur environ 350 titres en français plus une quarantaine en d’autres langues concernant le méthodisme francophone. Ce nombre est beaucoup plus élevé que mes estimations initiales. Néanmoins, il reste petit en comparaison avec d’autres langues. Il reflète l’implantation du méthodisme en Europe francophone qui a été faible en nombre de membres, multiforme en type d’Eglises méthodistes et discontinue dans la durée.
Le premier chapitre de mon exposé donnera un aperçu historique, essentiellement consacré à la situation en Europe. A cause de la complexité de l’évolution historique du méthodisme dans l’Europe francophone, j’ai groupé les références bibliographiques et relégué les détails dans les annotations. Un deuxième chapitre présentera des sources premières et secondaires en français sur Wesley.

Comme ouvrages d’ordre général sur le méthodisme on ne peut en citer que deux dont le deuxième est une traduction de l’anglais :
(1) Claude-Jean Bertrand, Le méthodisme (1971). Cet ouvrage est le seul en français qui présente le sujet du XVIIIe au XXe siècle, de la Grande-Bretagne aux Etats-Unis et jusqu’à la mission mondiale. Il présente le méthodisme sous un angle historique et doctrinal. A la fin de son introduction, Bertrand écrit :
« Le terrain d’ailleurs est mal défriché : rares sont les méthodistes qui ont échappé à la fascination du prophète et ont étudié les suites de son action. Plus rares encore les non-méthodistes qui se sont penchés ne fût-ce que sur le méthodisme du XVIIIe siècle. Ce livre ne saurait être qu’une introduction générale à une Église qui n’a jamais pris racine en France, et qui y est très mal connue. » [1]
L’ouvrage compte plus que 400 pages. Le méthodisme en France n’y couvre pas plus que deux pages. Pour une perspective générale, Bertrand reste l’ouvrage de référence en français.

2) Le deuxième ouvrage d’ordre général est une traduction de l’anglais. Il se limite à une présentation du méthodisme anglais du XVIIIe au XXe siècle : Rupert E. Davies, Méthodisme (1994). L’original a été publié la première fois en 1963 et est inspiré par les attentes œcuméniques au sujet de la réunion du méthodisme britannique avec l’Eglise anglicane. La traduction a été faite par des missionnaires au Congo (Éditions FaMéTh / Faculté Méthodiste de Théologie, Mulungwishi Likasi, Zaïre).


Note:
[1] C.-J. Bertrand, Le méthodisme. Librairie Armand Colin, Paris 1971, p. 8.


1) Le méthodisme francophone - aperçu historique

Le méthodisme s’est divisé en plusieurs branches. Dans ses débuts au XVIIIe siècle, le réveil méthodiste était déjà un mouvement plus multiforme et large que les seules « Sociétés Unies » sous la direction de John Wesley. Celui-ci donnait naissance à une branche anglaise du méthodisme qui est souvent appelée « wesleyenne » à partir du XIXe siècle. Cette branche anglaise et wesleyenne du méthodisme développait une œuvre francophone en France, en Suisse romande et en Belgique (cf. 1.1). Dans les colonies américaines, la branche wesleyenne du méthodisme arrivait relativement tard et se constitua en Eglise en 1784, suite à l’indépendance des Etats-Unis. Dans le méthodisme américain la fonction d’évêque était introduite et l’Eglise s’appelait Methodist Episcopal Church (Eglise méthodiste épiscopale). Plusieurs ramifications se sont développées dans le méthodisme américain dont trois ont ouvert une mission en terre francophone en Europe : (1) La branche initiale, The Methodist Episcopal Church (Eglise méthodiste épiscopale) avec une mission en France et en Suisse ; (2) L’Eglise qui s’est séparée de la première à cause de l’esclavage et qui était implantée dans les Etats du Sud des Etats-Unis : The Methodist Episcopal Church South (Eglise méthodiste épiscopale du Sud) avec une mission en Belgique ; (3) Une ramification de langue allemande de la première : The Evangelical Association (« Evangelische Gemeinschaft ») avec une mission en allemand en Alsace. Les trois ramifications américaines sont aujourd’hui réunies dans la United Methodist Church (Eglise évangélique méthodiste) (cf. 1.2). Une publication qui englobe pour la première fois l’ensemble de ces branches méthodistes et retrace leur présence en Europe au XIXe et XXe siècle sortira prochainement de la presse (en allemand et en anglais), mais ne sera pas disponible en français.[2]

Cet aperçu historique et bibliographique se limitera aux Eglises mentionnées et n’inclura ni l’Armée du Salut[3], issue d’une ramification dans la branche anglaise, ni l’Eglise du Nazaréen[4], issue d’une ramification dans la branche américaine. Toutefois des références à des publications nazaréennes seront données. L’œuvre méthodiste francophone au-delà de l’Europe ne sera mentionnée que brièvement pour montrer son importance numérique à l’heure actuelle (cf. 1.3).


Notes:
[2] Cf. Patrick Ph. Streiff, Der Methodismus in Europa im 19. und 20. Jahrhundert. EMK-Geschichte Monografien Band 50. Studiengemeinschaft für Geschichte der EmK, Wuppertal 2003 ; En anglais: Methodism in Europe: 19th and 20th century. Baltic Methodist Theological Seminary, Tallinn 2003.

[3] L’Armée du Salut est issue d’une des ramifications du méthodisme anglais autour de 1865. Elle s’est répandue également en France et en Suisse romande sous la direction énergique d’une des filles du couple Booth, Catherine Booth Clibborn, appelée la « Maréchale ». L’Armée du Salut s’est implantée dans beaucoup de régions où il n’y avait pas d’Eglises méthodistes et sa croissance a vite dépassé celle des méthodistes.

[4] L’Eglise du Nazaréen est issue d’une scission à l’intérieur de l’Eglise méthodiste épiscopale des Etats-Unis, suite au mouvement de sanctification. Elle a ouverte une mission en Europe continentale au milieu du XXe siècle. En Europe francophone, elle a quelques églises locales dans la région parisienne. Depuis peu, elle est devenue membre du Conseil méthodiste mondial, mais elle n’est pas encore membre du Conseil méthodiste européen.


1.1 La branche anglaise du méthodisme et sa mission francophone en Europe

(En Europe 1783-1939 ; en Suisse 1840-1900)

Une première présence du méthodisme en langue française se trouve dans les îles de la Manche autour de 1775. Ce début ne fut pas planifié. Deux pêcheurs de Jersey rencontrèrent des idées méthodistes sur les côtes de Terre-Neuve. Revenus à Jersey, ils les introduirent et l’un des deux s’occupa de traduire les prédications ou autres contributions orales en français. En 1783, un premier prédicateur itinérant en connexion avec John Wesley fut envoyé sur l’île. Trois ans plus tard, John Wesley, déjà âgé de 84 ans, visita Jersey et Guernesey. L’œuvre méthodiste s’y développa rapidement dans les deux langues. Le méthodisme francophone des îles de la Manche était une tête de pont importante pour bien des décennies dans le développement de la mission en France. Au XXe siècle, le travail en français diminua rapidement et ne pouvait plus apporter un soutien en personnel ou littérature. Des ouvrages d’auteurs méthodistes tracent l’histoire du méthodisme sur les îles de la Manche.[5] Des études historiques selon des standards scientifiques n’existent pas.
La même réserve doit être faite quant à l’historiographie du méthodisme wesleyen en France :
Th. Roux[6] a écrit une monographie qui couvre l’ensemble de l’histoire du méthodisme wesleyen en France et en Suisse et qui a été publiée peu après l’union des méthodistes avec les réformés en 1939. L’ouvrage est toujours utile et donne un résumé qui n’est pas dépourvu d’une certaine autocritique. Grâce à lui et à quelques autres publications, la branche anglaise ou wesleyenne du méthodisme francophone est relativement bien connue. Un des pionniers du méthodisme français, William Toase[7], décrit le début de l’œuvre dans une publication anglaise peu connue de nos jours. Parmi les publications francophones les mieux connues et accessibles sont des biographies[8] de quelques pasteurs. La liste des biographies englobe une quinzaine de personnes, pasteurs et membres laïcs. En outre, il existe un nombre élevé de sermons ou de traités d’occasion. Il est rare d’y trouver des ouvrages historiques ou théologiques plus consistants. Quelques traités sont des traductions et révèlent les liens avec le monde méthodiste allemand ou anglais. La plupart des titres historiographiques datent du XIXe siècle, le reste de la première moitié du XXe.
Il y a peu de travaux scientifiques. Deux thèses ou mémoires de recherche historique ont été écrits en français, mais ne sont pas publiés : une thèse (sans année) par Pierre Sogno[9] sur le début de la mission en France et un mémoire par Jacques-André Bonini[10] sur la Corse. Un article en anglais et un autre en allemand traitent spécifiquement du méthodisme francophone[11]. Des analyses du méthodisme français et de ses protagonistes se trouvent en outre dans les ouvrages sur le réveil franco-suisse du XIXe siècle, car le méthodisme constitua un de ses composants.[12] Particulièrement intéressante est la thèse non publiée de James Clifford Deming (en anglais).[13] Deming a fait des recherches sur le réveil dans le département du Gard où les méthodistes wesleyens étaient le mieux implantés. Il compare les différents courants au sein du protestantisme et analyse leurs interactions avec un environnement changeant. Il conclut que le réveil a eu une influence à la fois divisant et unifiant au sein de la communauté protestante. La région de la Drôme est également le sujet d’un colloque dont les actes ont été publiés par Pierre Bolle[14], mais que je n’ai pas encore pu consulter. Aucun autre travail de recherche qui traite de l’histoire du méthodisme en Europe francophone ne m’est connu. En bref : La connaissance du méthodisme wesleyen en France repose en majorité sur des ouvrages écrits par des méthodistes eux-mêmes, pour un public largement interne au mouvement et en vue de garder vivant le souvenir des personnalités et événements qui ont marqué son histoire.
L’évolution historique du méthodisme wesleyen en France était mouvementée. En 1790 ou 91, un commerçant méthodiste de Guernesey voyagea en Normandie. Il s’aperçut du manque de pasteurs réformés, mais rencontra auprès des protestants disséminés le désir d’écouter son témoignage. De retour, il demanda qu’un prédicateur méthodiste y soit envoyé. Le prédicateur De Quetteville commença des visites régulières en Normandie et un premier missionnaire fut officiellement envoyé. Celui-ci resta en Normandie pendant toute la période révolutionnaire, puis napoléonienne où tout contact avec l’Angleterre fut impossible. Deux Français qui s’étaient réfugiés sur les îles de la Manche devinrent méthodistes et retournèrent en France. En accord avec la stratégie de la société de mission méthodiste, ils voulaient contribuer au renouveau du protestantisme français.[15] Mais la manière de le faire restait le problème majeur de l’œuvre méthodiste. Les deux hommes intégrèrent le corps pastoral des réformés français, mais abandonnèrent l’application de la discipline méthodiste avec son système de réunions en petits groupes, appelés les « classes ». Les autres prédicateurs méthodistes réalisèrent qu’ils dépendaient pour l’exercice de leur fonction du bon plaisir des pasteurs de l’Eglise réformée (concordataire).
Suite aux émeutes anti-protestantes à Nîmes en 1814/15, l’intérêt des Anglais pour les protestants persécutés fut ranimé. La société de mission méthodiste trouva un nouveau missionnaire à envoyer : Charles Cook. Cook développait et organisait le méthodisme en France pendant quatre décennies (de 1818 jusqu’à sa mort en 1858). Cook débuta son ministère également en Normandie. Après un voyage dans la région de Nîmes, il reçut l’autorisation de la société missionnaire wesleyenne à Londres d’élargir l’œuvre vers le Sud. Dans la région du Gard les activités méthodistes se développaient le mieux, mais le méthodisme s’éparpillait sur plusieurs régions. En 1826, Cook épousa la fille du pasteur Marzials de Montauban qui, à son tour, devint un traducteur et éditeur des sermons de Wesley (cf. ci-dessous 2.1).
En 1820, Cook fit également un voyage en Suisse pour faire connaissance des personnes engagées dans le Réveil. Le réveil du début du XIXe siècle en Suisse romande fut souvent appelé « méthodiste » et ses adeptes les « mômiers ». A l’époque, une abondante littérature de controverse sur ce soi-disant « méthodisme » a vu le jour. Dans le cadre des recherches récentes sur le réveil, elle a mené à quelques études sur l’origine et la raison d’être de cette appellation.[16] Le sobriquet de « méthodiste » visait la nouveauté d’une influence spirituelle anglo-saxonne et, en comparaison avec les cercles moraves, d’une plus grande agressivité dans la manière de présenter ses convictions. Toutefois, ce « méthodisme » ne fut pas la conséquence directe d’une présence personnelle ou littéraire liée au méthodisme wesleyen qui n’intervint dans le bassin lémanique que plus tard. Charles Cook ne revint à Lausanne qu’en1840 pour y créer la base de la première communauté méthodiste (wesleyenne et francophone) en Suisse. Dès les années cinquante, une « école de théologie » pour la formation des futurs prédicateurs fut créée à Lausanne, par moments gérée en collaboration avec le séminaire de l’Eglise libre aux Cèdres, puis transféré à Paris en 1889. Le besoin d’héberger cette école de théologie à Lausanne ainsi que le souvenir du premier méthodiste suisse, Jean-Guillaume de la Fléchère, né à Nyon en 1729, puis collaborateur de Wesley en Angleterre,[17] ont amené les méthodistes anglais à construire la magnifique Chapelle du Valentin (planifiée comme « Fletcher Memorial Church ») qui était en flagrant contraste avec les moyens financiers limités des méthodistes francophones.
Lors de son premier voyage en Suisse en 1820, tout comme dans ses contacts avec des pasteurs réformés en France, Cook souligna « l’arminianisme évangélique » des wesleyens (plus tard souvent appelé « arminianisme wesleyen » avec son offre de la libre grâce de Dieu pour tous. Un petit nombre d’ouvrages théologiques fut publié dans la première moitié du XIXe siècle. « L’arminianisme évangélique » fut au centre des préoccupations en opposition avec le calvinisme stricte d’un Haldane ou Drummond ou Malan dans le réveil genevois. La compréhension de la sanctification et la notion wesleyenne de la perfection chrétienne furent au centre de la controverse avec le darbysme dans les années quarante. Lors de la montée du mouvement de sanctification en France dans les années septante, les méthodistes wesleyens espéraient le voir influencer l’ensemble du protestantisme « évangélique » français. Mais le mouvement était de courte durée.
Des candidats français qui voulaient devenir prédicateurs méthodistes, se présentaient régulièrement, par moments en plus grand nombre que la mission pouvait engager. Toutefois, la croissance numérique des sociétés locales ne fut pas comparable à la croissance du méthodisme sur les îles de la Manche ou en Angleterre ou dans la mission outre-mer. La France était un terrain différent du point de vue de la mentalité des gens, de la situation religieuse et du droit ecclésial. En Angleterre, les dirigeants de la mission méthodiste étaient convaincus que les recettes efficaces partout ailleurs devraient l’être également en France. Les adaptations que les méthodistes français avaient introduites allaient trop loin pour les méthodistes anglais qui les interprétaient comme une cause du peu de succès numérique en France. Pour certains méthodistes français, elles n’allaient pas assez loin et ils quittèrent le mouvement après quelques années.
Lorsque les méthodistes français reçurent l’autorisation de créer leur propre « Conférence Annuelle » (synode) en 1852, ils étaient les premiers, ensemble avec les Canadiens. La nouvelle structure donna une large autonomie par rapport à Londres. Trois problèmes restèrent. Premièrement, une représentation des laïcs au synode ne fut possible qu’à la suite de son introduction dans l’Eglise-mère en Angleterre en 1878. Deuxièmement, le changement structurel en 1852 n’apporta pas de clarification concernant le statut ecclésial de l’œuvre méthodiste. Celle-ci avait commencé à l’intérieur de l’Eglise réformée (concordataire) pour y apporter un renouveau à l’image de la mission initiale du méthodisme en Angleterre. Les méthodistes français y tenaient même après la création d’une conférence annuelle franco-suisse en 1852, mais des non méthodistes l’interprétèrent souvent comme la création d’une Eglise indépendante – à l’image de la scission de 1848/49 parmi les réformés. Dorénavant, les méthodistes naviguaient entre un statut interne à l’Eglise réformée (et de son aile évangélique) et un statut indépendant d’Eglise libre.[18] Le troisième problème restait la dépendance financière de Londres.
Parmi les initiatives méthodistes qui ont fait bénéficier les protestants au-delà du cercle restreint des sociétés méthodistes, il faut mentionner les publications (1833 fondation d’une société de publications méthodistes à Paris), les écoles du dimanche (1823 première école fondée à Caveirac ; 1852 fondation de la Société des Ecoles du Dimanche de France) ainsi que l’engagement pour introduire l’Alliance évangélique. Le méthodisme wesleyen a publié un nombre restreint de documents officiels en français, au début initié par les méthodistes des îles de la Manche. Ainsi le Recueil de Cantiques à l’usage des églises méthodistes des Îles de la Manche est le seul connu à cette date qui contient des traductions françaises de cantiques de Charles Wesley. Les traductions sont l’œuvre de Jean de Quetteville. Il n’est pas connu jusqu’à quand ce recueil était utilisé par les méthodistes en France et en Suisse. Au plus tard vers la fin du XIXe siècle, un autre recueil, Cantiques chrétiens, fut édité par les méthodistes en France. Une analyse des cantiques et de leurs origines n’a encore jamais été faite. Les premières publications sur l’organisation méthodiste datent d’après la création d’une conférence annuelle franco-suisse : Règles de la société chrétienne méthodiste (1854) et L’Eglise Evangélique Méthodiste : Aperçu de son Organisation, de sa Discipline et de ses Institutions (par J.-P. Cook, 1883).[19] A part un formulaire pour la consécration d’un pasteur (publié en 1908), aucun formulaire liturgique nous est connu.[20] L’architecture intérieure des chapelles du XIXe siècle a révélé que l’assemblée s’agenouillait (certainement pour la prière) et que la sainte-cène était célébrée en s’avançant vers une petite ballustrade autour du chœur où les fidèles s’agenouillaient pour communier.[21] Traditionnellement, les méthodistes chantaient debout.
En 1870, les méthodistes franco-suisses étaient dispersés sur 184 chapelles ou lieux de réunions, avec 30 pasteurs ou proposants, 22 évangélistes et 101 prédicateurs laïques sur un total de 2,000 membres adultes et environ 2'500 enfants dans les écoles du dimanche. L’influence du mouvement de sanctification des années septante donnait des ailes à de nouvelles initiatives méthodistes, mais contrairement aux pays alémaniques, les résultats à long terme étaient maigres en France, même parmi les méthodistes. Londres finança une œuvre d’évangélisation, conduite par William Gibson, dans les grandes villes et parmi la population catholique. En 1893, une partie de l’œuvre fut réintégrée à la Conférence Annuelle franco-suisse et les cercles dans la banlieue parisienne furent transférés aux Réformés ou au Luthériens les plus proches. Une mission méthodiste en Kabylie fut créée en 1886. Cette mission s’unira plus tard avec celle d’une branche méthodiste américaine. Vers la fin du XIXe siècle, les méthodistes wesleyens en France devaient faire face à un effectif de membres diminuant et à des dettes financières de plus en plus pesantes. Ils travaillèrent depuis toujours parmi une population très pauvre et n’arrivèrent jamais à créer suffisamment de recettes parmi leurs membres ce qui précipita leur fin. L’œuvre en Suisse romande fut abandonnée en 1900 et le bâtiment le plus majestueux dans toute la conférence annuelle franco-suisse, la Chapelle du Valentin à Lausanne, fut vendue aux méthodistes américains qui y avaient commencé un travail de langue allemande. La branche anglaise ou wesleyenne ne continuait qu’en France.
Après la première guerre mondiale, les méthodistes wesleyens ne profitèrent pas d’une aide à la reconstruction et au développement de leur travail à l’image des méthodistes américains en Europe. En plus, Londres avait une perspective œcuménique différente. L’Eglise-mère poussa les méthodistes en France à abandonner leur indépendance. L’union ne se fit pas avec les méthodistes américains, entre temps également dans le pays, mais dans le cadre d’un grand projet de fédération dans le protestantisme français. En 1939, la majorité des méthodistes se joignit à l’Eglise Réformée nouvellement constituée. Ils y étaient une petite minorité pour ne pas dire une quantité négligeable.[22] Dans le plan d’union de 1939, la paroisse anglophone à Paris en fut exclue et les méthodistes anglais y continuaient jusqu’en 1977. Une petite minorité de méthodistes français aurait rejoint une fédération, mais ne voulait pas entrer dans une union. Ils décidèrent de garder leur indépendance et formèrent l’Eglise méthodiste de France (parfois également appelée « Eglise évangélique méthodiste » comme son homonyme de la branche américaine). Celle-ci continuait avec six églises locales autour de Nîmes et une à Paris totalisant environ 300 membres adultes. Cette petite Eglise a re-édité des ouvrages méthodistes antérieurs et publié quelques nouveaux traités historiques ou théologiques, sous l’impulsion de Samuel Samouélian. Actuellement, elle est dans une phase de transition vers un rattachement à l’Eglise évangélique méthodiste, issue du méthodisme américain.


Notes:
[5] Matthieu Lelièvre, Histoire du Méthodisme dans les Iles de la Manche (Librairie Evangélique, Paris 1885) ; François Guiton, Histoire du Méthodisme dans les Iles de la Manche (John Mason, London, sans année).
L’ouvrage le plus recent est en anglais : R. D. Moore, Methodism in the Channel Islands (Epworth Press, London 1952) ; le seul article sur un sujet spécifique est : Arthur Mignot, ‘Mon Plaisir’ and the Methodists in Guernsey. Dans : PWHS, 53/2 (May 2001), pp. 42-45.

[6] Th. Roux, Le Méthodisme en France : Pour servir à l’Histoire religieuse d’hier et d’avant-hier (Librairie protestante, Paris 1941).

[7] William Toase, The Wesleyan Mission in France: With an account of the labours of Wesleyan ministers among the French prisoners, during the late war (John Mason, London 1835).

[8] Entre autres des biographies de :
- Charles Cook (vol. 1 par J.-P. Cook, 1862 ; vol. 2 par Matthieu Lelièvre, 1897) ;
- Emile-F. Cook (par E. Farjat, 1877);
- Madame Julie Cook (par Charles Cook et Matthieu Lelièvre, 1907) ;
- Matthieu Gallienne et son journal de 1877 (par John Waller, 1989),
- Louis Jaulmes (par E. Farjat, 1849)
- Armand de Kerpezdron (sans auteur, 1982),
- Matthieu Lelièvre (par Th. Roux, 1932) ;
- Pierre du Pontavice (par Matthieu Lelièvre, 1904) ;
- Onésime Prunier (par Edmond Gounelle, 1931) ;
- Madame Julie Pulsford, née Comert (par James Hocart, 1887)
- Jean de Queteville (par Henry de Jersey, 1847)
- Jean-Louis Rostan (par Matthieu Lelièvre, 1865) et
- William Toase (par un auteur anonyme, 1874).

[9] Pierre Sogno, Les débuts du méthodisme wesleyen en France: 1791-1825. Thèse non-publiée, Faculté des Lettres et Sciences humaines de l’Université de Paris, (sans année).

[10] Jacques-André Bonini, Le méthodisme wesleyen en Corse : Pour servir à l’histoire du protestantisme corse sous le Second Empire. Mémoire soutenu à Paris le 9 octobre 2001. Faculté de Théologie Protestante de Paris (non publié).

[11] John Waller, British Wesleyan Methodism and the post-war recovery of Methodism in France, 1871-74. Dans : PWHS, 45/4 (Feb. 1986), pp. 97-115 ; Patrick Streiff, Die Heiligungsbewegung in Frankreich und der französische Methodismus. Dans : Mitteilungen der Studiengemeinschaft für Geschichte der EmK. Reutlingen 1994/1, pp. 28-43.

[12] Cf. l’article récent de Sébastien Fath, Deux siècles d’histoire des Eglises évangéliques en France (1802-2002). Dans : Hokhma, no. 81 (2002), pp. 1-51.

[13] James Clifford Deming, Protestantism and society in France: Revivalism and the French Reformed Church in the Department of the Gard, 1815-1848 (Diss. non-publiée, University of Notre Dame, 1989).

[14] Pierre Bolle, La vie des Eglises protestantes de la vallée de la Drôme de 1928 à 1938, actes. (Les Bergers et les mages, Paris 1977).

[15] Le méthodisme se développait surtout parmi les protestants tandis que le baptisme était particulièrement actif parmi la population catholique (cf. Sébastien Fath, Une autre manière d’être chrétien en France : Socio-historique de l’implantation baptiste. 1810-1950. Labor et Fides, Genève 2001).

[16] Ulrich Gäbler, Der Weg zum Réveil in Genf. Dans : Zwingliana XVI (1983/2), pp. 142-167 ; Patrick Streiff, Die Breitenwirkung des Methodismus im 18. Jahrhundert als Grundlage der Beurteilung seines Einflusses auf die Erweckungsbewegung. Dans : U. Gäbler (Ed.) Erweckung am Beginn des 19. Jahrhunderts. Amsterdam 1986, pp. 59-72 ; Roland Wetter, Histoire du méthodisme wesleyen en Suisse romande, Opus I, Les origines, Lausanne 1989 ; Patrick Streiff, Wie “methodistisch” war die Erweckung in der französischsprachigen Schweiz? Dans : Mitteilungen der Studiengemeinschaft für Geschichte der EmK. Reutlingen 1995/2, pp. 30-56.

[17] Patrick Streiff, Jean-Guillaume de la Fléchère … Ein Beitrag zur Geschichte des Methodismus (P. Lang, Bern 1984) ; en anglais : Patrick Streiff, Reluctant Saint? A Theological Biography of Fletcher of Madeley (Epworth Press, 2001).

[18] Il est intéressant de noter que S. Samouélian interprète le changement structurel comme constitution d’une Eglise autonome (S. Samouélian, Le Réveil méthodiste, Publications évangéliques méthodistes, Nîmes 1974, p. 25) malgré les protestations contraires parmi les dirigeants méthodistes de l’époque.

[19] Pour les îles de la Manche W.-J. Handcock, a publié Sommaire des lois organiques et règles de discipline des églises méthodistes d’Angleterre (Etienne Barbey Librairie, Guernesey, sans année).

[20] A la suite du colloque, je venais de découvrir une liturgie méthodiste éditée à Jersey en 1894.

[21] Cf. la rénovation de la Chapelle du Valentin à Lausanne dans les années 1980.

[22] Marc Boegner ne les mentionne même plus dans son ouvrage L’exigence œcuménique : Souvenirs et perspectives (Ed. Albin Michel, Paris 1968) à part une petite notice p. 77.


1.2 Les ramifications du méthodisme américain et leurs missions francophones

Trois ramifications du méthodisme américain œuvraient en Europe francophone. La branche la plus importantes parmi elles, l’Eglise méthodiste épiscopale, n’envisageait pas de commencer une œuvre dans les pays francophones. Après l’autonomie des méthodistes wesleyens de la branche anglaise dans une conférence annuelle à partir de 1852, ils soutenaient financièrement cette œuvre au lieu d’ouvrir leur propre œuvre jusqu’à la crise financière des années soixante. Au tournant vers le XXe siècle, l’Eglise méthodiste épiscopale voulut intensifier sa mission dans les pays catholiques de l’Ouest et du Sud de l’Europe. La séparation entre Etat et Eglise en France en 1905 fut considérée comme un signe favorable. Les attentes de succès furent complètement démesurées (un million de personnes évangélisées en 25 ans) tout comme en Italie. En outre, les responsables de la mission pensaient que la situation du catholicisme en France était comparable à celle en Italie. A cause de la courte durée de seulement trois décennies, l’œuvre (francophone) de l’Eglise méthodiste épiscopale en France est presque inconnue, même parmi les méthodistes français d’aujourd’hui. Le seul résumé de son histoire se trouvait dans l’histoire officielle de la société de mission des méthodistes américains, éditée en anglais par Copplestone.[23]
Les premiers pasteurs et évangélistes pour la nouvelle initiative venaient des méthodistes d’Italie, de la Suisse romande et du Canada, ou de l’Armée du Salut. Les méthodistes « américains » s’implantèrent à l’Est du Rhône où les « britanniques » n’étaient pas présents. L’idée initiale d’atteindre la population ouvrière dans cinq centres urbains échoua, mais les prédicateurs et évangélistes méthodistes étaient surpris du bon accueil dans les villages savoyards. En comparaison avec la stagnation parmi les méthodistes britanniques l’œuvre des méthodistes « américains » se développait plutôt bien quoique loin derrière les rêveries des débuts. A la suite de la première guerre mondiale, l’Eglise méthodiste épiscopale voulait résolument développer sa présence dans les pays autour de la Mer Méditerranée. Elle créa trois diocèses d’évêques en Europe au lieu d’un seul. Un des trois évêques fut chargé de l’Europe de l’Ouest et du Sud et prit résidence à Paris ! L’œuvre en France fut élargie à d’autres régions comme la vallée de la Marne près de Paris où un immense projet de reconstruction d’une région dévastée était à l’étude, avec le soutien de l’Union Chrétienne de Jeunes Gens. Toutefois, les difficultés financières de la société de mission méthodiste aux Etats-Unis au milieu des années vingt ne permirent pas de réaliser l’ensemble du projet. Entre temps, il y avait en France à peu près le même nombre de méthodistes dans la branche américaine que dans la branche anglaise, chacune d’environ 1'200 membres adultes. Au début des années trente, les coupes budgétaires successives devinrent dramatiques. Une union avec les méthodistes « wesleyens » ne fut plus possible, car leur Eglise-mère voulait également se désengager et poussait vers une union avec les réformés. Un cri d’alarme pour trouver un soutien auprès des amis américains fut lancé en 1931, mais la situation s’aggrava à cause du décès subit de l’évêque en place à Paris. Finalement, les méthodistes américains abandonnèrent l’œuvre en 1935 et offrirent aux réformés de continuer le travail si eux le veulent et peuvent. Il ne restait que trois églises locales en Alsace – toujours de langue allemande – qui rejoignirent la conférence annuelle en Suisse.
Une ramification différente du méthodisme américain était de langue allemande (aux Etats-Unis et en Europe), la « Evangelische Gemeinschaft ». Cette branche ouvrit une mission en Alsace peu avant la guerre franco-allemande de 1870/71. Après la guerre, l’Alsace devint allemande. La présence méthodiste continuait en langue allemande jusqu’aux années 1960. L’« Evangelische Gemeinschaft » était mieux implantée en Alsace que l’Eglise méthodiste (épiscopale). Ensemble, depuis 1968, elles forment actuellement l’Eglise Evangélique Méthodiste avec une dizaine d’églises locales en Alsace - Lorraine et trois dans le Sud-ouest de la France. Toutes ces églises locales d’origine alémanique ainsi que les quatre en Suisse romande (anciennement Eglise méthodiste épiscopale en langue allemande) sont devenues francophones. Elles comptent environ 1'000 membres adultes en France et 300 en Suisse romande. Cette branche méthodiste a créé le Centre Méthodiste de Formation Théologique (CMFT) en 1988 pour apporter un complément en méthodisme dans la formation théologique des futurs pasteurs. Le CMFT a commencé un programme modeste de publications[24] et planifie d’ouvrir prochainement un site Internet qui mettra à disposition d’un public plus large des textes méthodistes (y compris des textes de source de John Wesley), une base de données bibliographiques des publications francophones sur le méthodisme et le catalogue de sa bibliothèque.[24bis]
En Belgique, les méthodistes de la branche anglaise avaient commencé des réunions dans les environs de Bruxelles en 1816. Il n’est pas connu à quelle date au courant du XIXe siècle cette œuvre cessa d’exister et cette branche du méthodisme se retira de la Belgique.[25] Parmi les publications méthodistes éditées à Bruxelles, plusieurs ouvrages ne portent pas de date, mais deux petits catéchismes ont été édités en 1905. On ignore quelle branche du méthodisme l’a initié. Après la première guerre mondiale, l’Eglise méthodiste épiscopale du Sud (Etats-Unis) décida de venir en aide dans la reconstruction et l’évangélisation en Europe. Elle choisit trois pays sans présence méthodiste, entre autres la Belgique. L’œuvre de cette ramification du méthodisme américain a édité quelques brochures et périodiques, mais n’a jamais été elle-même l’objet d’une publication. Elle commença dans les environs de Bruxelles avec des institutions sociales et la distribution de Bibles et traités chrétiens. Elle fut également frappée par la crise économique mondiale des années trente et l’Eglise-mère voulait l’abandonner. Les méthodistes belges (environ mille membres adultes) tenaient à continuer. Au début du Troisième Reich allemand et avant l’invasion de la Belgique, les méthodistes étaient engagés dans une organisation d’aide pour les juifs qui voulaient fuir l’Allemagne. Après la deuxième guerre mondiale, le méthodisme en Belgique se développa à nouveau grâce au soutien de l’Eglise-mère en faveur de la reconstruction en Europe. Les méthodistes belges s’engagèrent dans la fondation d’institutions protestantes de formation (écoles, faculté de théologie à Bruxelles). Les initiatives se sont réalisées de plus en plus en collaboration avec les autres Eglises protestantes. Dès les années soixante, une fédération ou union d’Eglises protestantes fut discutée. En 1969, les méthodistes belges s’unirent avec l’Eglise Evangélique Protestante de Belgique (de tradition luthérienne). Après une deuxième union avec les réformés, l’Eglise unie a pris le nom « Eglise Protestante Unie de Belgique ». Celle-ci a garde des liens fraternels avec l’Eglise Evangélique Méthodiste, mais il n’y a pas de signes que la tradition méthodiste jouerait encore un rôle formateur dans cette Eglise.


Notes:
[23] Copplestone, J. Tremayne, History of Methodist Missions, vol. IV: Twentieth-Century Perspectives, The Methodist Episcopal Church, 1896-1939 (The Board of Global Ministries, The United Methodist Church, New York 1973) ; cf. également l’annotation 2 ci-dessus pour la publication la plus récente.

[24] Faire partie de l’Eglise Evangélique Méthodiste (Gotthelf-Verlag, Zurich 1996 ; 2e éd. révisée Librairie Biblique Certitude, Metz 2002) ; Fondements doctrinaux et principes sociaux : Eglise Evangélique Méthodiste, conférence générale 1996 (Librairie Biblique Certitude, Metz 1997) ; Christ devant nous. Commission théologique du Conseil Méthodiste Européen (Librairie Biblique Certitude, Metz 1999) ; Amour du prochain et témoignage : Un même appel (Librairie Biblique Certitude, Metz 2002) ainsi que l’édition de la version française des manuels d’un cours biblique en 34 leçons : La foi – pas à pas. Devenir disciples de Jésus par l’étude de la Bible (Librairie Biblique Certitude, Metz 1998-99). {Cf. page publications sur ce site internet}

[24bis] Cf. ce site actuel, ouvert en été 2004.

[25] A la suite du colloque, Jean-Pierre van Noppen m’a mis en contact avec Hugh R. Boudin, ancien recteur de la Faculté de Théologie Protestante à Bruxelles, qui a écrit sa thèse sur les Eglises protestantes et l’Etat en Belgique de 1814 à 1839 et y traite de la première vague méthodiste et de ses acteurs. Cf. également Hugh R. Boudin, Bibliographie du protestantisme belge, 1781-1996. Ed. Prodoc Uitgaven, Bruxelles 1999.



1.3 Le méthodisme francophone au-delà de l’Europe

En tant que complément, il peut être utile de rappeler que la communauté méthodiste francophone la plus grande se trouve en Afrique, suivie des Caraïbes, et que la partie européenne est la plus petite. Autant des ramifications anglaises qu’américaines ont organisé des œuvres missionnaires dans des pays francophones. En ce qui concerne le méthodisme wesleyen d’Angleterre et l’Eglise méthodiste épiscopale des Etats-Unis, il existe des histoires officielles de leurs sociétés de missions qui retracent les débuts de l’œuvre[26], au plus tard jusqu’en 1939. Peu de pays sont documentés avec plus d’une petite feuille d’information.[27] La connaissance historique n’est pas meilleure pour les autres Eglises dans la tradition méthodiste qui ont œuvré dans des pays de la francophonie.
Le livret d’information du Conseil méthodiste mondial (éd. 2002-2006) donne les chiffres suivants pour les pays en dehors de l’Europe qui font partie de la francophonie :[28]
{Le premier chiffre indiqué concerne les membres adultes, le deuxième la communauté élargie y compris enfants et jeunes)
Afrique :
Algérie et Tunisie
Eglise du Nazaréen (29 / 50)
Eglise Protestante d’Algérie (1'000 / 5’000)
Eglise Protestante de Tunisie (800 / 1’400)
Bénin
Eglise Méthodiste Indépendante (7'000 / 18’000)
Eglise Méthodiste Protestante (110'400 / 120’000)
Eglise Méthodiste (16'973 / 75’294)
Eglise du Nazaréen (15 / 50)
Méthodiste Africaine (4'622 / 6’000)
Burundi
Eglise Evangélique Méthodiste (UMC) (106'150 / 200’000)
Eglise Méthodiste Libre (32'298 / 70’000)
Cameroun
Eglise Méthodiste Libre (837 / 1’500)
Congo, République démocratique (anciennement Zaïre)
Centrale du Christ en Afrique (2'000 / 5’000)
Eglise Méthodiste Episcopale Africaine (2'000 / 5’000)
Eglise Evangélique Méthodiste (UMC) (1'200'000 / 2'000’000)
Eglise Méthodiste Indépendante (2'000 / 5’000)
Eglise Méthodiste Libre (52'600 / 150’000)
Eglise du Nazaréen (11'092 / 17’753)
Shaba Méthodiste (5'000 / 12’000)
Côte d’Ivoire
Eglise Méthodiste Episcopale Africaine (1'500 / 3’000)
Eglise Méthodiste Episcopale Africaine Zion (818 / 1’825)
Eglise Méthodiste Libre (3'000 / 5’000)
Eglise Méthodiste Protestante (nouvellement EEM/UMC) (1'400'000 / 1'400’000)
Eglise du Nazaréen (1'653 / 2’000)
Rwanda
Eglise Méthodiste Libre (58'634 / 100’000)
Eglise du Nazaréen (15'972 / 30’000)
Sénégal
Eglise du Nazaréen (24 / 48)
Togo
Eglise Méthodiste Episcopale Africaine (475 / 600)
Eglise Méthodiste (18'692 / 38’816)
Caraïbes :
Guadeloupe
Eglise du Nazaréen (15 / 70)
Haïti
Eglise Méthodiste Episcopale Africaine (10'000 / 20’000)
Eglise Méthodiste Episcopale Chrétienne (1'500 / 2’500)
Eglise Méthodiste Libre (18'800 / 33’100)
Eglise Méthodiste en Caraïbes (6'739 / 20’000)
Eglise du Nazaréen (60'402 / 84’000)
Eglise Wesleyenne (8'288 / 10’000)

A part la traduction d’un ouvrage général, cité au début de cet article, et d’une version africaine du Règlement d’Eglise aucune publication francophone en histoire ou théologie méthodiste m’est connue du continent africain.
L’Eglise du Nazaréen a une maison de publication francophone à Kansas City (Etats-Unis), la Maison des Publications Nazaréennes. Celle-ci s’est efforcée de publier des ouvrages méthodistes en français, ces dernières années.


Notes:
[26] Pour le méthodisme anglais : Findlay, G. G., and Holdsworth, W. W., The History of the Wesleyan Methodist Missionary Society, vol. IV (The Epworth Press, London 1922) ;
Pour le méthodisme américain : Barclay, Wade Crawford, History of Methodist Missions, vol. III: The Methodist Episcopal Church 1845-1939: Widening Horizons 1845-95 (The Board of Missions of The Methodist Church, New York 1957) ; Copplestone, J. Tremayne, History of Methodist Missions, vol. IV: Twentieth-Century Perspectives. The Methodist Episcopal Church, 1896-1939 (The Board of Global Ministries, The United Methodist Church, New York 1973).

[27] J’ai trouvé des références à des ouvrages (mais sans pouvoir les localiser tous dans des bibliothèques) pour les pays suivants (dates de publication entre parenthèses) : Kabylie / Algérie (1887, 1909, 1959, 1971), Guinée (1843), Côte d’Ivoire (1992), Côte de l’Or (thèse 1995). Pour certains pays et Eglises méthodistes, il existe des informations brèves sur des sites web ou comme publications (cf. les Factsheet de la branche anglaise).

[28] World Methodist Council, Handbook of Information : 2002-2006 (Biltmore Press, Lake Junalaska 2002). J’inclus l’Algérie dans la liste même si elle n’est pas membre de l’agence intergouvernementale de la francophonie.


2) Wesley et son œuvre sous un angle francophone


2.1 Sources primaires


Si on veut étudier des textes de John Wesley en français, seules deux publications de sermons sont actuellement disponibles : La Voie du salut : messages de John Wesley, une co-production de douze sermons de 1986, éditée par les publications évangéliques méthodistes à Nîmes et la maison des publications nazaréennes à Kansas City. Celle-ci a publié en 1998 Le Sermon sur la Montagne, expliqué dans une série de discours par John Wesley qui contient douze sermons de Wesley sur Matthieu chap. 5 à 7 (le treizième et dernier manque !). Les deux publications se basent sur des éditions antérieures qui ont été revues et adaptées à l’évolution de la langue française. Aucun autre texte de Wesley n’a été publié depuis plus de cent ans ! Et même les publications récentes ne satisfont pas à des exigences d’une édition critique.[29]
Matthieu Lelièvre mentionne dans son ouvrage sur la théologie de Wesley que tous les sermons de références (no. 1 à 53) sont disponibles dans une édition française. Finalement, le CMFT a pu se procurer au moins des photocopies des anciennes éditions françaises de sorte que nous avons pu établir une liste qui contient la moitié des sermons de Wesley (76 sur les 151) ! On peut distinguer trois anciennes éditions de sermons à part les deux mentionnées ci-dessus. La première date de 1836 et est l’œuvre du pasteur réformé Th. Marzials, le beau-père de Charles Cook. Marzials a fait un choix intéressant de presque cinquante sermons et y a inclus un bon nombre de sermons plus tardifs que les sermons de référence. Une deuxième publications de 1857 était consacrée aux treize sermons de la série du Sermon sur la Montagne dont Marzials n’avait inclus qu’un seul. L’édition de 1888 que Lelièvre mentionne présentait l’ensemble des 53 sermons de référence.[30] Elle puisait dans les éditions antérieures qui étaient complétées par la traduction des 14 sermons qui manquaient encore parmi les sermons de référence. Mais l’édition de 1888 se limitait aux sermons de référence et n’y ajouta plus les autres sermons déjà publiés par Marzials. La connaissance de la pensée de Wesley se limitait alors au sermon de référence tandis que les sermons plus tardifs tombaient définitivement en oubli.
Mes recherches dans les bases de données des bibliothèques nationales m’ont amené à découvrir quelques autres publications de sources. Il y a eu deux fois une édition d’un sermon isolé. Plus intéressantes sont les trois autres publications. Dans l’ordre de leur parution il est étonnant de voir la plus ancienne déjà en 1772 à Lyon : une traduction de Médecine primitive, le manuel de Wesley pour une médecine simple et applicable par les pauvres. Les deux autres publications datent de 1840 : Conseils adressés aux chrétiens surnommés méthodistes (Advice to the people called Methodists) ainsi que Exposition de la perfection chrétienne, par J. Wesley, traduite de l’anglais sur la seizième édition et suivie de notes par Anthelme Boucher. Le lieu de publication ainsi que le nom du traducteur n’indique que pour la dernière une claire appartenance aux méthodistes wesleyens en France. Aucune trace d’une publication de sources primaires n’a pu être trouvés parmi les méthodistes francophones des îles de la Manche, parmi les méthodistes épiscopaux en France ou parmi les méthodistes épiscopaux du Sud pour la Belgique. Aucun autre traité de Wesley, ni des extraits de son journal ou de ses lettres ne semblent être traduits en français.


Notes:
[29] Dans le cadre des publications du CMFT nous avons envisagé de commencer une telle édition critique et étions prêts à publier les cinq premiers sermons dans la série du Sermon sur la Montagne quand nous étions surpris par la publication nazaréenne. Nous garderons le travail préparatoire effectué en vue d’une publication sur un site internet.

[30] L’édition française suivait ainsi la tradition américaine de compter les no. 1 à 53 parmi les sermons de référence et pas seulement les no. 1 à 44 comme la tradition anglaise le faisait en général. Après le colloque, vers fin juillet 2003, les sermons de référence selon l’ancienne édition française ont été rendus accessible sur un site internet : < http://123-bible.chez.tiscali.fr> {cf. sur ce site, sous "Liens", "Site avec des sources primaires de Wesley"}.


2.2 Littérature secondaire


Si la recherche bibliographique des sources primaires a apporté une bonne surprise pour les sermons de John Wesley et une déception concernant d’autres éléments littéraires de son œuvre, la littérature secondaire est un peu plus variée. L’intérêt s’est porté plutôt sur la biographie que sur des thèmes historiques ou théologiques. Il y a davantage de publications au XXe siècle.
Dans les biographies, la plupart des ouvrages a une visée populaire. Cinq des quatorze biographies ont été éditées au XIXe siècle. La première est une traduction de l’ouvrage de Richard Watson, édité en 1840. Elle est suivie par la première édition de l’œuvre de Matthieu Lelièvre en 1868. Sa 5e édition revue et augmentée paraîtra en 1924 et les éditions plus récentes en sont des réimpression. Lelièvre traduisait également la biographie de W.-Morley Punshon et la publiait en 1878. Quelques années auparavant (1870), Charles de Remusat publiait une biographie de Wesley. Trois biographies publiées par les méthodistes wesleyens en dix ans est un nombre élevé. Il doit être en rapport avec un bon développement de l’œuvre pendant ces années et un certain intérêt pour Wesley au-delà des cercles méthodistes sous l’influence du mouvement de sanctification.
Au début du XXe siècle, le monde francophone a apporté plusieurs contributions importantes à l’interprétation de Wesley et du méthodisme qui ont trouvé un écho également dans le monde anglophone. Ces contributions n’émanaient pas d’auteurs méthodistes. La première fut un article publié – à ma connaissance – pour la première fois dans la Revue de Paris en 1906 par Elie Halévy.[31] Contre la thèse généralement reconnue et largement popularisée que le méthodisme sous Wesley a eu le mérite d’épargner à l’Angleterre une révolution à la française, Halévy reproche au méthodisme d’avoir discipliné la masse des pauvres ouvriers industriels ce qui a retardé leur émancipation et a fait le jeu de ceux qui exploitaient la population ouvrière. La discussion de cette thèse a continué en Angleterre jusqu’à nos jours.
Puis en 1910, une deuxième publication française créa la surprise dans le monde méthodiste, même anglophone. Le catholique Auguste Léger publia sa thèse sur la jeunesse de Wesley. Il prit le contre-pied de l’interprétation méthodiste qui soulignait l’importance de la conversion de Wesley en 1738. Léger mit l’accent sur la consécration de Wesley pour une vie sainte en 1725 et brossa le tableau d’un Wesley beaucoup plus catholique que les méthodistes revivalistes ne l’ont jamais imaginé. Pour Léger, l’expérience de 1738 n’est pas le grand tournant dans la vie de Wesley, mais le point culminant après un long cheminement. L’image qu’il utilise pour illustrer son interprétation est parlante. Il s’agit de l’expérience d’atteindre le point culminant après une longue montée vers le sommet d’une montagne :
« Pourquoi décrirait-on davantage comme un point de départ ce qui n’est qu’une étape décisive ou qu’un point culminant dans le progrès de la vie chrétienne : le moment, non pas où l’âme commence à se tourner vers Dieu, mais où elle le possède et s’y repose ? En ce sens, la conversion de Wesley date de 1725, non du 24 mai 1738. »[32]
La fausse interprétation de l’événement de 1738 en tant que « conversion évangélique » est, selon Léger, la source des erreurs d’un réveil qui veut provoquer un accouchement de nouvelles naissances sans grossesse préalable. Léger impute la faute à la « puérile antithèse entre la foi et les œuvres que lui inculquait, du dehors, l’influence étrangère de Boehler ».[33] L’interprétation de Léger fit un tollé de protestations parmi les méthodistes. Autant ceux-ci interprétaient le cheminement spirituel de Wesley à travers les lunettes du Réveil du XIXe siècle et de son insistance de connaître le moment exact de sa conversion, autant Léger l’interprétait à travers les lunettes d’un catholicisme qui dénigrait et minimisait l’influence morave et avec elle l’influence luthérienne sur Wesley.
Une troisième contribution importante de la francophonie au début du XXe siècle fut l’ouvrage du Père franciscain Maximin Piette, publié en Belgique en 1925 et qui portait un préface d’Augustin Léger. Cet « opus magnus » (en pages, presque 700, et en contenu) place Wesley dans l’évolution du protestantisme. Piette commence par montrer l’évolution du protestantisme avant le XVIIIe siècle, puis décrit la situation au XVIIIe siècle en focalisant sur l’Angleterre pour consacrer plus de la moitié de son ouvrage à « la réaction de John Wesley ». Son analyse est à la fois historique et théologique, mais s’arrête au XVIIIe siècle. Pour lui, les trois grandes réactions antérieures au méthodisme (les réactions anabaptiste, luthérienne et calviniste) ont épuisé leurs meilleures énergies avant le XVIIIe siècle. Il compare le méthodisme au piétisme allemand en concluant que « Wesley a mieux réussi que les piétistes ses maîtres ».[35] Pour Piette, le méthodisme n’est pas seulement intéressant au niveau historique ou sociologique à cause de sa croissance, mais également au niveau théologique :
« … au point de vue doctrinal, le méthodisme occupe une situation unique par la primauté qu’il accorde à l’expérience religieuse. …Il jette un pont entre le conservatisme orthodoxe et le pragmatisme subjectiviste. »[36]
Piette analyse la pensée doctrinale de Wesley et conclut :
« Son apostolat étant une croisade de vie chrétienne, il met en évidence non des théories savantes, mais des expériences vécues. … Ici elle (sc. l’expérience) portait avant tout sur un double état d’âme : le sentiment du péché d’une part, et l’assurance de la justification hic et nunc d’autre part. Le passage d’un état à l’autre se fait en un instant de crises par la conversion ou le New birth. Pour défendre sa méthode expérimentale Wesley en appelle aux résultats pratiques de sa prédication : l’amélioration morale de ses auditeurs. La justification par la foi qu’il prêche est plus proche de la doctrine du concile de Trente que de ce qu’il nomme dédaigneusement le solifideisme furieux de Luther. »[37]
Malgré cette pointe qui a suscité discussion, l’ouvrage de Piette a trouvé un écho largement favorable parmi des méthodistes anglais et américains, car il a fait des recherches rigoureuses et a apporté sa critique de manière modérée. La 2e édition revue et augmentée porte même les noms des distributeurs officiels des publications méthodistes parmi les méthodistes wesleyens d’Angleterre et des méthodistes épiscopaux du Sud des Etats-Unis.
Sous l’influence de la biographie de Léger, Matthieu Lelièvre a révisé et augmenté sa biographie dont la dernière et cinquième édition parut en 1924. La même année, il publia également La Théologie de Wesley, seul ouvrage de son genre publié par un auteur méthodiste francophone. Le volume est issu d’un cours que Lelièvre avait donné aux étudiants de l’Ecole de théologie méthodiste en 1904-1905. Il fait partie des méandres méthodistes que Lelièvre trouva plus de soutien pour ses projets de publications auprès des méthodistes épiscopaux du Sud travaillant en Belgique que parmi les méthodistes épiscopaux travaillant dans son propre pays.
Parmi les contributions francophones à la connaissance de Wesley figure un article de Jean Orcibal sur Les spirituels français et espagnols chez John Wesley et ses contemporains, publié en 1951. Orcibal rappelle que John Wesley connaissait les deux langues et qu’il lisait des auteurs en français jusqu’à l’âge avancé. Quiconque s’intéresse à l’influence des mystiques français et espagnols sur Wesley ainsi qu’aux éditions de leurs œuvres ou biographies que Wesley a publiées, trouve une mine d’or dans cet article jusqu’à nos jours.[38]
Plusieurs biographies populaires ont été écrites également au courant du XXe siècle. Elles soulignaient le côté revivaliste de Wesley et cimentaient la fausse impression que Wesley ait continué son œuvre d’évangéliste en dehors de l’Eglise anglicane. Parmi les monographies d’auteurs méthodistes, on peut mentionner à nouveau les efforts de la maison des publications nazaréennes qui a éditié récemment la traduction française d’une introduction de la théologie de Wiley et d’une présentation de la théologie wesleyenne-arminienne de Wynkoop. Mais l’original anglais du premier date des années quarante, celui du deuxième ouvrage des années soixante. Les deux publications montrent l’embarras des nazaréens de ne pas trouver de titres théologiques plus récents et l’oubli dans lequel sombre la francophonie pour les autres traditions méthodistes anglaise ou américaine. L’un ou l’autre mémoire d’un futur pasteur méthodiste était consacré à un sujet lié à la théologie wesleyenne. Parmi les intervenants à ce colloque, Rose-May Privet nous fera part de ses recherches dans la conception de l’éducation chez Wesley, suite à son mémoire John Wesley et l’éducation des enfants : un engagement selon ses convictions (mémoire non-publié, Strasbourg 2001).
Bien que la récolte bibliographique soit maigre en nombre, cinq ouvrages d’auteurs non méthodistes de la fin du XXe siècle méritent d’être mentionnés :
En 1986, un mémoire présenté trois ans auparavant à la Faculté Universitaire de Théologie protestante de Bruxelles par Daniel Brandt-Bessire fut publié sous le titre Aux sources de la spiritualité pentecôtiste (Genève 1986). Brandt était parmi les tout premiers à montrer l’évolution théologique qui mena de Wesley via de la Fléchère vers le mouvement de sanctification du XIXe siècle et finalement au pentecôtisme du XXe siècle.[39]
L’année du bicentenaire de la mort de Wesley en 1991, Louis Rataboul, angliciste ayant enseigné à Paris et à Nice, publia une biographie John Wesley : un anglican sans frontières. Celle-ci est toujours utile à consulter, surtout pour ceux et celles qui ne maîtrisent pas l’anglais. Elle a tendance à exagérer certains traits comme les rapports de Wesley avec les femmes ou les convulsions du début du réveil aux dépens d’autres aspects comme la théologie.
Dans le domaine de la prédication, nous avons le plaisir d’avoir deux auteurs de recherches parmi nous lors de ce colloque : Françoise Deconinck-Brossard qui a écrit sur la Vie politique, sociale et religieuse en Grande-Bretagne d’après les sermons prêchés ou publiés dans le Nord de l’Angleterre : 1738-1760 (2 vol., Didier érudition, Paris 1984). La recherche analyse les sermons de beaucoup de personnes et parmi elles de Wesley. Jean-Pierre van Noppen a publié en anglais ses recherches linguistiques sur les débuts du réveil méthodiste (Transforming Words: The Early Methodist Revival from a Discourse Perspective. Bern 1999).[40]
La dernière publication en date est celle de Bernard Cottret qui retrace, sous un angle différent de Piette, l’évolution du protestantisme. Dans son Histoire de la réforme protestante, XVIe au XVIIIe siècle (Ed. Perrin, 2001) il présente l’Allemand Luther, le Français Calvin et l’Anglais Wesley. Il étudie surtout le rapport entre l’Evangile et la Loi chez les trois auteurs en plaçant leur conception dans le contexte historique. Il conclut la partie sur Wesley avec la comparaison suivante :
« Si Luther est l’homme du choc initial, si Calvin demeure par la clarté de son esprit l’inventeur d’une civilisation, Wesley nous permet à son tour de renouveler notre vision de la Réforme. Mal connu en France, en dépit de sa célébrité dans le reste du monde, il opère en sa personne ‘la synthèse de l’éthique protestante de la grâce et de l’éthique, catholique, de la sainteté’. Son témoignage est capital pour comprendre, en enjambant le concile de Trente et les controverses du XVIe siècle, l’unité fondamentale du fait chrétien. … Après Luther, après Calvin, Wesley n’a d’autre souci que de promouvoir une religion du salut qui soit aussi celle de l’authenticité vécue. Et de l’intensité. »[41]
Sur la page de couverture du livre on ne voit que la peinture de Lucas Cranach le jeune « Groupe de réformateurs » et le titre Histoire de la réforme protestante ainsi qu’un petit sous-titre XVIe – XVIIIe siècle. Ce n’est qu’à l’intérieur que le lecteur découvre que Cottret consacre un tiers de son livre à Wesley. Est-ce un reflet de ce Wesley « mal connu en France » ?


Notes:
[31] Elie Halévy, La naissance du méthodisme en Angleterre. Dans : Revue de Paris, 1er et 15 août 1906 (selon les indications dans M. Piette, La Réaction de John Wesley dans l’Evolution du Protestantisme, Bruxelles 1927, p. X).

[32] A. Léger, La Jeunesse de Wesley : L’Angleterre religieuse et les origines du méthodisme au XVIIIe siècle (Librairie Hachette, Paris 1910), p. 366. Cf. ce qui précède et suit cette citation.

[33] A. Léger, La Jeunesse de Wesley, p. 365.

[34] M. Piette, La Réaction de John Wesley dans l’Evolution du Protestantisme (La Lecture au Foyer, Bruxelles 1927, 2e éd. revue et augm.). Dans sa préface à la deuxième édition, Augustin Léger espère que Piette réalisera son projet d’y ajouter un deuxième ouvrage qui présentera l’évolution ultérieure du méthodisme. Malheureusement, il n’en fut rien.

[35] M. Piette, La Réaction de John Wesley dans l’Evolution du Protestantisme, p. 646.

[36] M. Piette, La Réaction de John Wesley dans l’Evolution du Protestantisme, p. IX.

[37] M. Piette, La Réaction de John Wesley dans l’Evolution du Protestantisme, p. 647.

[38] Après le colloque, j’ai reçu une copie de la thèse d’Edmond Gounelle, Wesley et ses rapports avec les Français, de 1898, qui traite également de l’influence des mystiques français sur Wesley.

[39] Le mémoire a été rédigé avant la parution de l’ouvrage anglais de Donald W. Dayton, Theological Roots of Pentecostalism (Francis Asbury Press, Grand Rapids 1987). Celui-ci deviendra l’ouvrage de référence et a fait connaître cette évolution théologique.

[40] Suite au colloque, Jean-Pierre van Noppen m’a communiqué la liste complète de ses publications liées aux méthodisme. Celles-ci figureront dans la bibliographie méthodiste qui devrait paraître sur le site internet du CMFT. {Entre temps publiées sur ce site}.

[41] Bernard Cottret, Histoire de la réforme protestante : Luther, Calvin, Wesley, XVIe – XVIIIe siècle (Ed. Perrin, 2001).