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Auteur :
Patrick Ph. Streiff

Article :
Le méthodisme français et les particularités de son histoire

Conférence donnée à la Société d'Etudes du Méthodisme Français, Montpellier, 2014
Publiée dans :
JL Prunier & JF Zorn (éd.), Facettes du méthodisme français. Editions Ampelos 2016, pp. 5-30



Introduction


L’histoire du méthodisme francophone est particulièrement compliquée, mouvementée, peu recherchée et souvent tombée dans l’oubli. Je suis donc très heureux de l’initiative du pasteur Jean-Louis Prunier de créer la Société d’Études du Méthodisme Français. Ma contribution à cette journée d’étude en 2014 ne présentera pas de nouvelles recherches mais j’essaierai de retracer les grandes lignes de l’histoire des différents courants du méthodisme en France. J’évoquerai brièvement aussi d’autres pays francophones.[1]

Toute la bibliographie du méthodisme francophone reflète la précarité dans l’historiographie.[2] Lors de la création du Centre Méthodiste de Formation Théologique en 1988, il y avait trente ou quarante titres méthodistes en français dans la bibliothèque. Ce nombre s’est nettement élargi. Grâce à des recherches dans les fonds des bibliothèques nationales en Suisse, France et Belgique, j’ai récolté des données sur environ 350 titres en français, à quoi s’ajoute une quarantaine en d’autres langues concernant le méthodisme francophone. Sur le site internet du Centre Méthodiste de Formation Théologique[3], ces recherches bibliographiques sont accessibles ainsi que d’autres sources primaires et secondaires sur le méthodisme francophone. Mais la plus grande partie des titres date du XIXe siècle. Les publications du XXe siècle ont été plus éparses, et parmi elles se trouvent peu de recherches scientifiques.

La description de Claude-Jean Bertrand dans son ouvrage Le méthodisme, daté de 1971, est malheureusement toujours d’actualité pour la francophonie après plus de quarante ans. A la fin de son introduction, Bertrand écrit :

« Le terrain d’ailleurs est mal défriché : rares sont les méthodistes qui ont échappé à la fascination du prophète et ont étudié les suites de son action. Plus rares encore les non-méthodistes qui se sont penchés ne fût-ce que sur le méthodisme du XVIIIe siècle. Ce livre ne saurait être qu’une introduction générale à une Église qui n’a jamais pris racine en France, et qui y est très mal connue. »[4]
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[1] La contribution se base essentiellement sur les deux documents suivants : (1) Patrick Streiff, Le méthodisme francophone : aperçu historique et bibliographique. Dans : John Wesley, Actes du colloque à l’occasion du tricentenaire de la naissance du fondateur du méthodisme, Edition du CMFT, 2003; et (2) Patrick Streiff, Der Methodismus in Europa im 19. und 20. Jahrhundert. EMK-Geschichte Monografien Band 50, Studiengemeinschaft für Geschichte der EmK, Stuttgart 2003 – en anglais: Methodism in Europe: 19th and 20th century, Tallinn 2004.
Depuis mon élection au ministère d’évêque en 2005, le temps que je peux consacrer à des recherches scientifiques et à la rédaction d’articles historiques ou théologiques reste extrêmement limité. Avant 2005, mon mandat (à temps partiel) pour créer et diriger le Centre Méthodiste de Formation Théologique et enseigner à la Faculté de Théologie de l’Université de Lausanne m’avait donné la chance inouïe d’apprendre à connaître le méthodisme francophone pour moi-même, et de le faire connaître à d’autres pendant une bonne quinzaine d’années.

[2] Les grands ouvrages sur l’histoire du méthodisme ont également pris de l’âge.
Il s’agit, pour le méthodisme anglais, d’un ouvrage de 1922: Findlay, G. G., and Holdsworth, W. W., The History of the Wesleyan Methodist Missionary Society, vol. IV, The Epworth Press, London 1922 ;
et, pour le méthodisme américain, de deux volumes de 1957 et 1973 : Barclay, Wade Crawford, History of Methodist Missions, vol. III: The Methodist Episcopal Church 1845-1939: Widening Horizons 1845-95, The Board of Missions of The Methodist Church, New York 1957 ; et Copplestone, J. Tremayne, History of Methodist Missions, vol. IV: Twentieth-Century Perspectives. The Methodist Episcopal Church, 1896-1939, The Board of Global Ministries, The United Methodist Church, New York 1973.
Entre 2003-2005, le “General Board of Global Ministries” a publié une suite en sept volumes, mais qui n’évoquent que très rarement les pays francophones en Europe.

[3] Site internet : www.cmft.ch .

[4] C.-J. Bertrand, Le méthodisme, Librairie Armand Colin, Paris 1971, 8.

1) Les premières connaissances du méthodisme au XVIIIe siècle



Les débuts du réveil méthodiste au XVIIIe siècle étaient plus multiformes et étendus que les seules « Sociétés Unies » sous la direction de John Wesley. Celles-ci donnèrent naissance à une branche anglaise du méthodisme qui est souvent appelée « wesleyen » à partir du XIXe siècle. Cette branche anglaise et wesleyenne du méthodisme commença une œuvre francophone en France, en Suisse romande et en Belgique et se développa surtout au XIXe siècle. Parmi les autres branches du réveil en Angleterre figurait également la branche calviniste qui était largement majoritaire au début du réveil. J’ignorais que cette branche calviniste était présente en France et je me réjouis d’en entendre plus par la contribution de Jean-Yves Carluer, pendant cette journée d’étude.

L’historiographie sur le méthodisme débute en général avec l’arrivée du méthodisme « wesleyen » dans les îles de la Manche, puis en France, vers la fin du XVIIIe siècle. Mais on oublie alors que des nouvelles sur le réveil en Angleterre sont arrivées en Europe francophone bien avant. Les « réveillés » dans l’Europe du XVIIIe siècle, moraves, piétistes ou méthodistes, avaient toutes sortes de correspondances et contacts entre eux, peu connus et peu recherchés. En voici au moins quelques pistes concernant la connaissance du méthodisme en terre francophone avant la venue des premiers missionnaires.

Les premières traces de connaissance sont liées aux cercles moraves. Du côté de la Suisse romande, la société morave à Genève joue un rôle prépondérant.[5] Le Comte Zinzendorf la visite en 1741, puis l’année suivante l’Alsacien Philippe Molther, de tendance quiétiste, qui était à l’origine de la dispute entre Wesley et les moraves dans la Société de Fetter Lane à Londres en 1739-40. Cette dispute amena Wesley à quitter la Société de Fetter Lane et à former sa propre société à la Fonderie, à Londres. Molther resta à Genève de 1742 jusqu’à son expulsion en 1744. Le jeune libraire James Hutton, membre du cercle initial des méthodistes de Fetter Lane même avant Molther s’allia également avec les moraves. Hutton se distança des frères Wesley et vint en Suisse une première fois en 1748-49, puis y résida durant sept ans à partir de 1756.

Un pasteur luthérien, devenu morave, Pierre Conrad Fries, parcouru la France en 1761-62, et visita les protestants disséminés ; il participa aux assemblées du désert, tint un journal de toutes les rencontres et retourna à Herrnhut pour donner son rapport. A quelques endroits de son périple à travers la France, il utilisait le terme « méthodiste » pour caractériser les gens qu’il rencontrait, mais de manière peu spécifique.[6] Quelques années plus tard, un Suisse devenu prêtre anglican, personnalité importante parmi les méthodistes anglais, Jean Guillaume de la Fléchère, revint sur le continent.[7] Le premier voyage vers le sud de la France et la Suisse romande eut lieu durant quelques mois en 1770, puis un deuxième plus long pour sa convalescence où il resta de 1778-81 dans sa ville natale de Nyon. Le premier voyage se fit sous l’impulsion d’un riche commerçant méthodiste anglais qui allait régulièrement au sud de la France. On ignore quelle sorte de contact ce commerçant entretenait avec des protestants disséminés avant son premier voyage avec de la Fléchère en 1770. Mais il est évident que des nouvelles sur le réveil méthodiste en Angleterre sont arrivées en France bien avant les premiers missionnaires officiellement envoyés.

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[5] P. Streiff, Wie „methodistisch“ war die Erweckung in der französischsprachigen Schweiz? In: Mitteilungen der Studiengemeinschaft für Geschichte der Evangelisch-methodistischen Kirche, Christliches Verlagshaus, Stuttgart 1995/2, pp. 30-56.

[6] Heidi et Dieter GEMBICKI, Le réveil des coeurs. Journal de voyage du frère morave Fries (1761-1762), Le Croit Vif, Paris 2013. Fries termine son journal par la remarque suivante sur la France : « Tout est triste dans le pays d’où je sors : j’ai vu le mal de cette pauvre nation que j’ai visitée, j’en ai parlé au Sauveur, j’en ai pleuré… »

[7] Cf. Patrick Streiff, Jean-Guillaume de la Fléchère … Ein Beitrag zur Geschichte des Methodismus, P. Lang, Bern 1984 ; en anglais : Patrick Streiff, Reluctant Saint? A Theological Biography of Fletcher of Madeley, Epworth Press, Peterborough 2001.

2) Le méthodisme wesleyen anglais et sa mission francophone pendant le XIXe siècle (France à partir de 1791 ; Suisse 1840-1900)

2.1 La branche anglaise et wesleyenne du méthodisme et sa mission jusqu’à l’établissement d’une Conférence annuelle en 1852


Une première présence du méthodisme en langue française commence dans les Îles de la Manche autour de 1775. Ce début n’était pas planifié. Il est l’œuvre de laïques, comme c’est le cas beaucoup plus souvent qu’on ne le pense dans la propagation de tels mouvements. En 1783, un premier prédicateur itinérant en connexion avec John Wesley est envoyé dans une des îles. Trois ans plus tard, John Wesley, déjà âgé de 84 ans, visite Jersey et Guernesey. L’œuvre méthodiste s’y développe rapidement dans les deux langues. Le méthodisme francophone dans ces îles est devenu une tête de pont importante pour plusieurs décennies dans le développement de la mission en France. Puis, au XXe siècle, le travail francophone dans les îles diminue rapidement et ne peut plus apporter un soutien en personnel, en finance ou en littérature pour la France.[8]

Avant de parler de l’histoire du méthodisme en France, j’ajoute une note sur son historiographie.[9] Le genre littéraire des biographies, très en vogue parmi les adeptes du réveil du XIXe siècle, se pratique également parmi les méthodistes.[10] Les biographies, et plus encore les quelques journaux personnels et autobiographiques qui sont préservés, sont une source riche pour retracer l’histoire. En outre, il existe un nombre élevé de sermons ou de traités d’occasion, et également des traductions de sermons de Wesley même au-delà des sermons de référence. Mais il est rare de trouver des ouvrages historiques ou théologiques plus consistants. La plupart des titres en français datent du XIXe siècle, le reste de la première moitié du XXe. Il y a peu de travaux de recherche scientifique ; ils sont souvent liés à une recherche sur le protestantisme dans une certaine région. Il existe des travaux sur les débuts de la mission en France [11], le réveil dans le département du Gard [12], le protestantisme dans la région de la Drôme [13], ainsi que les missions en Corse [14] et en Kabylie [15].

L’évolution du méthodisme wesleyen en France a été mouvementée. Les débuts datent de 1790 ou 91 avec la visite d’un commerçant méthodiste de Guernesey en Normandie. En rencontrant des protestants disséminés qui désirent écouter son témoignage, il s’aperçoit du manque de pasteurs réformés. De retour à Guernesey, il demande qu’un prédicateur méthodiste y soit envoyé. Thomas Coke fait un voyage explorateur jusqu’à Paris en 1791, espérant que la révolution apportera à la France la liberté religieuse nécessaire pour lancer une évangélisation fructueuse. Le premier missionnaire envoyé en 1791 demeure en Normandie pendant toute la période révolutionnaire, puis napoléonienne où tout contact avec l’Angleterre est impossible.

Sans entrer dans les détails historiques sur la mission en France et son développement, il est important de comprendre son orientation : la stratégie vise à contribuer au renouveau du protestantisme français. Ainsi les méthodistes wesleyens veulent faire en France ce qu’ils considèrent comme leur mission en Angleterre : être agent de réveil parmi les protestants. Mais cette vision occasionne en même temps toutes sortes de limitations et de problèmes d’identité. Dès le début de la mission, quelques prédicateurs s’intègrent au corps pastoral des réformés français tout en abandonnant l’application de la discipline méthodiste avec son système de réunions en petits groupes, appelés les « classes », ainsi que l’itinérance des prédicateurs méthodistes et l’alliance qui les lie entre eux. Ceux qui demeurent prédicateurs méthodistes restent limités dans leur action par l’accord des instances de l’Église réformée (concordataire). La différence est flagrante en comparaison avec la mission des baptistes qui agissent de manière autonome et visent l’évangélisation des catholiques en France.[16]

Parmi tous les missionnaires et pasteurs méthodistes, un nom doit être mentionné : Charles Cook. Suite aux émeutes contre les protestants à Nîmes en 1814/15, l’intérêt des Anglais pour les protestants persécutés est éveillé. La société de mission méthodiste trouve alors un nouveau missionnaire à envoyer, Charles Cook. Cook développe et organise le méthodisme en France pendant quatre décennies (de 1818 jusqu’à sa mort en 1858). Il commence son ministère en Normandie, mais après un voyage dans la région de Nîmes, il reçoit l’autorisation par la société missionnaire wesleyenne à Londres d’élargir l’œuvre vers le sud. Dans la région du Gard, au cœur d’une région protestante, les activités méthodistes se développent mieux. En 1826, Cook épouse la fille du pasteur Marzials de Montauban. Son beau-père devient traducteur et éditeur des sermons de Wesley.

Prédicateur itinérant infatigable, Cook essaie de trouver des ouvertures pour évangéliser et créer des sociétés méthodistes dans beaucoup de régions. En 1820, il entreprend un voyage en Suisse pour faire connaissance des personnes engagées dans le Réveil. Le réveil du début du XIXe siècle en Suisse romande est souvent appelé « méthodiste » et ses adeptes « mômiers ». A l’époque, une abondante littérature de controverse sur ce soi-disant « méthodisme » voit le jour. Les recherches sur le réveil ont mené à quelques études sur l’origine et la raison d’être de cette appellation.[17] Le sobriquet de « méthodiste » visait la nouveauté d’une influence spirituelle anglo-saxonne et, en comparaison avec les cercles moraves, une approche plus agressive dans la manière de présenter ses convictions et d’évangéliser. Toutefois, ce « méthodisme » n’est pas la conséquence directe d’une présence personnelle ou littéraire liée au méthodisme wesleyen. Une telle influence n’intervient dans le bassin lémanique que plus tard. En 1840, Charles Cook revient à Lausanne pour y créer la base de la première communauté méthodiste (wesleyenne et francophone) en Suisse.

Lors de son premier voyage en Suisse en 1820, tout comme dans ses contacts avec des pasteurs réformés en France, Cook souligne « l’arminianisme évangélique » des wesleyens (plus tard souvent appelé « arminianisme wesleyen ») avec l’offre de la libre grâce de Dieu pour tous. Un petit nombre d’ouvrages théologiques est alors publié dans la première moitié du XIXe siècle. « L’arminianisme évangélique » s’oppose au calvinisme strict du réveil genevois. Puis, dans les années quarante, la compréhension de la sanctification et la notion wesleyenne de la perfection chrétienne deviennent le centre de la controverse avec le darbysme. Dans toutes ses controverses, Cook demeure un ardent défenseur de la théologie wesleyenne, mais il se met à dos des réformés traditionnels ainsi que des gens du réveil. Parmi les initiatives méthodistes qui sont reçues plus positivement et font bénéficier les protestants au-delà du cercle restreint des sociétés méthodistes, il faut mentionner les publications (1833 fondation d’une société de publications méthodistes à Paris), les écoles du dimanche (1823 première école fondée à Caveirac ; 1851 publication Le Magasin des Écoles du Dimanche, 1852 fondation de la Société des Écoles du Dimanche de France)[18] ainsi que l’engagement pour introduire l’Alliance évangélique et l’Union Chrétienne des Jeunes Gens.

Mais « l’arminianisme wesleyen » n’est pas sans intérêt pour une jeune génération de français qui se sentent appelés à devenir pasteurs méthodistes. Des candidats se présentent régulièrement, par moments en plus grand nombre que la mission peut engager. La croissance numérique des sociétés locales n’est pas comparable à la croissance du méthodisme dans les Îles de la Manche, en Angleterre ou dans la mission outre-mer, et l’évolution des finances ne l’est pas non plus. La France reste un terrain différent du point de vue de la mentalité des gens, de la situation religieuse et du droit ecclésial. En Angleterre, les dirigeants de la mission méthodiste ont des difficultés à le comprendre. Ils sont convaincus que les recettes efficaces partout ailleurs devraient l’être également en France. Les adaptations que les méthodistes français introduisent vont trop loin pour les méthodistes anglais qui les tiennent comme responsables du peu de succès numérique en France. Mais pour plusieurs méthodistes français très qualifiés, ces adaptations ne vont pas assez loin et, déçus, ils quittent le mouvement après quelques années. En plus, la stratégie d’œuvrer pour le réveil parmi la population protestante limite sévèrement l’audience de l’action méthodiste.

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[8] Matthieu Lelièvre, Histoire du Méthodisme dans les Iles de la Manche, Librairie Évangélique, Paris 1885; François Guiton, Histoire du Méthodisme dans les Iles de la Manche. John Mason, London, sans année.
L’ouvrage le plus récent en anglais : R. D. Moore, Methodism in the Channel Islands, Epworth Press, London 1952; seul article sur un sujet spécifique: Arthur Mignot, ‘Mon Plaisir’ and the Methodists in Guernsey, dans : PWHS, 53/2 (May 2001), pp. 42-45. Des études historiques selon des standards scientifiques n’existent pas.

[9] William Toase, The Wesleyan Mission in France: With an account of the labours of Wesleyan ministers among the French prisoners, during the late war, John Mason, London 1835. Toase était un des pionniers de l’œuvre en langue française. Th. Roux, Le Méthodisme en France : Pour servir à l’Histoire religieuse d’hier et d’avant-hier, Librairie protestante, Paris 1941. Roux écrit la monographie après l’union des méthodistes avec les réformés en 1939 pour conserver la mémoire.

[10] Des biographies, journaux personnels ou lettres de :
- Charles Cook (vol. 1 par J.-P. Cook, 1862 ; vol. 2 par Matthieu Lelièvre, 1897) ;
- Emile-F. Cook (par E. Farjat, 1877);
- Madame Julie Cook (par Charles Cook et Matthieu Lelièvre, 1907) ;
- Matthieu Gallienne, grand-père, père et fils : The Gallienne Letters, 1835-1895 (par May Morley, sans date, préface 1991),
- Matthieu Gallienne et The Journal of Matthew Gallienne, 1877 (par John Waller, 1989),
- Louis Jaulmes (par E. Farjat, 1849)
- Armand de Kerpezdron (sans auteur, 1982),
- Matthieu Lelièvre (par Th. Roux, 1932) ;
- Pierre de Pontavice (par Matthieu Lelièvre, 1904) ;
- Onésime Prunier (par Edmond Gounelle, 1931) ;
- Jean-Louis Rostan (par Matthieu Lelièvre, 1865) et
- William Toase (par un auteur anonyme, 1874).

[11] Pierre Sogno, Les débuts du méthodisme wesleyen en France: 1791-1825. Thèse non-publiée, Faculté des Lettres et Sciences humaines de l’Université de Paris, (sans année).

[12] James Clifford Deming, Protestantism and society in France: Revivalism and the French Reformed Church in the Department of the Gard, 1815-1848, Thèse non-publiée, University of Notre Dame, 1989.

[13] Pierre Bolle (éd.), La vie des Églises protestantes de la vallée de la Drôme de 1928 à 1938, Les Bergers et les mages, Paris 1977.

[14] Jacques-André Bonini, Le méthodisme wesleyen en Corse : Pour servir à l’histoire du protestantisme corse sous le Second Empire, mémoire soutenu à Paris le 9 octobre 2001, Faculté de Théologie Protestante de Paris (non publié).

[15] Zohra Ait Abdelmalek, Protestants en Algérie : Le protestantisme et son action missionnaire en Algérie aux XIXe et XXe siècles. Editions Olivétan, 2004. Jean-Louis Prunier, Une présence protestante française en Kabylie (1885-1919) : La Mission méthodiste française à Il Maten (Mémoire de Master-recherche, Montpellier 2011) ; cf. également le chapitre sur la Mission de Paris en Algérie, dans Jean-François Zorn, Le grand siècle d’une mission protestante : La Mission de Paris de 1822 à 1914, Ed. Karthala, Paris 2012 (2e éd. revue et augmentée).

[16] Le méthodisme se développe surtout parmi les protestants tandis que le baptisme était particulièrement actif parmi la population catholique, cf. Sébastien Fath, Une autre manière d’être chrétien en France : Socio-historique de l’implantation baptiste : 1810-1950, Labor et Fides, Genève 2001.

[17] Ulrich Gäbler, Der Weg zum Réveil in Genf, Dans : Zwingliana XVI (1983/2), pp. 142-167; Patrick Streiff, Die Breitenwirkung des Methodismus im 18. Jahrhundert als Grundlage der Beurteilung seines Einflusses auf die Erweckungsbewegung, Dans : U. Gäbler (Ed.), Erweckung am Beginn des 19. Jahrhunderts, Amsterdam 1986, pp. 59-72; Roland Wetter, Histoire du méthodisme wesleyen en Suisse romande, Opus I, Les origines, Lausanne 1989; Patrick Streiff, Wie “methodistisch” war die Erweckung in der französischsprachigen Schweiz? Dans: Mitteilungen der Studiengemeinschaft für Geschichte der EmK, Reutlingen 1995/2, pp. 30-56.

[18] Jean-Paul Cook, Histoire et organisation d’une École du Dimanche avec quelques conseils à ceux qui donnent aux enfants une instruction religieuse, Lausanne 1847. Cf. Anne Ruolt, L’école du dimanche en France au XIXe siècle : Pour croître en grâce et en sagesse, Paris 2012.

2.2 Le développement de la Conférence franco-suisse à partir de 1852 jusqu’à la veille du XXe siècle


Déjà dans les années 1830, un des secrétaires de la mission britannique soutient l’indépendance de l’œuvre en France, mais il ne reçoit pas l’accord de l’ensemble des dirigeants du comité de mission. Le méthodisme anglais n’a pas créé une structure de plusieurs niveaux de conférences qui relieraient les conférences annuelles entre eux, comme le méthodisme américain l’a fait antérieurement. Toutes les missions wesleyennes dépendent encore de Londres. Mais la quête pour plus d’indépendance continue. Avec les Canadiens, les méthodistes français sont les premiers à recevoir l’autorisation de créer leur propre conférence annelle (synode) en 1852. En 1860, la Conférence annuelle France-Suisse compte 150 chapelles ou lieux de cultes, 25 prédicateurs, 1500 membres adultes et 1700 enfants dans les écoles du dimanche. Ces chiffres montrent à quel point l’œuvre est éparpillée. La moyenne est de 10 membres par lieux de prédication. Ce nombre est bas, même si on prend en compte le seuil important que représente le fait de devenir membre, et le nombre plus élevé d’adhérents et de participants aux cultes. Ce nombre restreint reste un problème récurant pour les méthodistes français et ils le partagent avec les réformés qui vivent souvent de manière dispersée.

La nouvelle structure d’une conférence autonome donne une large indépendance par rapport à Londres. Toutefois, trois problèmes demeurent. Premièrement, une représentation des laïques au synode ne devient possible qu’à la suite de son introduction dans l’Église-mère en Angleterre en 1878 bien que les Français l’aient souhaité depuis longtemps. En France, les laïques jouent un rôle important dans la structure de l’Église réformée (concordataire). Mais Londres ne veut pas permettre à sa fille ce qu’on essaie d’empêcher en Angleterre pendant longtemps (et ce que les méthodistes en Écosse auraient également voulu). Deuxièmement, le changement structurel en 1852 n’apporte pas de clarification concernant le statut ecclésial de l’œuvre méthodiste. Celle-ci a commencé à l’intérieur de l’Église réformée (concordataire) pour y apporter un renouveau à l’image de la mission initiale du méthodisme en Angleterre. Les méthodistes français tiennent à cette œuvre même après la création d’une conférence annuelle franco-suisse en 1852, mais des non méthodistes l’interprètent souvent comme la création d’une Église indépendante – à l’image de la scission de 1848/49 parmi les réformés. Dorénavant, les méthodistes naviguent entre un statut interne à l’Église réformée (et de son aile évangélique) et un statut indépendant d’Église libre.[19] Le troisième problème reste la dépendance financière de Londres. Les méthodistes travaillent parmi une population pauvre et n’ont que rarement atteint des réformés riches et haut placés. La location des lieux de réunion est chère et dépend du bien vouloir de leurs propriétaires. En plus, la dette sur la propriété appartenant aux méthodistes est lourde. Avec l’indépendance liée à une conférence annuelle, les méthodistes français reçoivent un soutien financier de l’Église méthodiste épiscopale des États-Unis. Celle-ci ne veut pas elle-même ouvrir une mission en langue française, et utilise aussi les locaux des wesleyens à Paris pour une œuvre en langue allemande (début en 1866, mais fermé lors de la guerre de 1870/71). Le soutien des méthodistes américains n’est pas bien vu par Londres. Car tout au long du XIXe siècle, et trop longtemps même au XXe siècle, les deux branches du méthodisme se voient mutuellement comme concurrents. Suite aux difficultés économiques liées à la guerre civile aux USA, l’Église méthodiste épiscopale doit arrêter son soutien pour les méthodistes wesleyens.

Après l’établissement d’une conférence annuelle en 1852, les méthodistes créent une « école de théologie » pour la formation des futurs pasteurs à Lausanne, au début gérée en collaboration avec le séminaire de l’Église libre des Cèdres, puis transférée à Paris en 1889. Le besoin d’héberger cette école de théologie à Lausanne et le souvenir du premier méthodiste suisse et collaborateur de Wesley, Jean-Guillaume de la Fléchère, né à Nyon en 1729, ont amené les méthodistes anglais à construire la magnifique Chapelle du Valentin (planifiée comme « Fletcher Memorial Church ») qui était en flagrant contraste avec les moyens financiers limités des méthodistes francophones.

Le méthodisme wesleyen publie un nombre restreint de documents officiels en français, au début initié par les méthodistes des Îles de la Manche. Ainsi, le Recueil de Cantiques à l’usage des églises méthodistes des Îles de la Manche contient des traductions françaises de cantiques de Charles Wesley. Les traductions sont l’œuvre de Jean de Quetteville, mais ne deviennent pas très populaires. Toutefois, une recherche récente de cantiques a révélé que d’autres personnalités du réveil francophone se sont inspirées des cantiques de Charles Wesley et les ont publiés sous leur propre nom.[20]

Les premières publications sur l’organisation méthodiste datent d’après la création d’une conférence annuelle franco-suisse : Règles de la société chrétienne méthodiste (1854) et L’Église évangélique méthodiste : Aperçu de son Organisation, de sa Discipline et de ses Institutions (par J.-P. Cook, 1883).[21] À part un formulaire pour la consécration d’un pasteur (publié en 1908), nous n’avons pas trouvé trace de liturgies méthodistes wesleyennes en France.

La prédication des méthodistes français peut être caractérisée comme appel à la conversion et à une vie sanctifiée. Elle était axée sur l’évangélisation afin que l’auditeur se reconnaisse comme pécheur qui a besoin de la grâce de Dieu et fasse confiance en Christ son sauveur. La plupart des traités méthodistes vise la conversion. Ce que les méthodistes apportent au protestantisme français est la compréhension de la grâce pour tous, une grâce qu’il faut librement et délibérément accepter. Ce message de tendance arminienne est bien reçu par beaucoup de pasteurs réformés qui le préfèrent au calvinisme strict du réveil genevois. Le message vise l’individu. C’est évident aussi dans la manière de parler de la sanctification parmi les méthodistes français. Celle-ci est également axée sur l’individu, et rarement articulée dans sa dimension sociale comme en Angleterre. Le livre de William Arthur (La Langue de Feu), publié en 1864, ne soutient pas non plus l’engagement social. Le méthodisme français, petit en nombre et plus répandu dans une zone rurale et protestante, ne développe pas un ministère socio-diaconal et urbain à l’image des « Central Hall Missions » en Angleterre.

En 1874, le mouvement de sanctification se répand en France. Il est bien accueilli par des pasteurs réformés proches de l’Alliance évangélique, mais il s’agit de la deuxième vague de sanctification américaine qui est plus individualiste et moins imprégnée par une théologie méthodiste. Dans la même période, le sud de la France vit une crise économique et une vague de maladies. Le mouvement de sanctification semble alors donner des ailes aux méthodistes et, enfin, apporter un réveil véritablement méthodiste.[22] Les méthodistes espèrent qu’enfin la notion wesleyenne de la perfection chrétienne influencera l’ensemble du protestantisme « évangélique » français. Ils s’engagent dans des réunions de prière et de « consécration » ensemble avec des pasteurs de la « Société de mission intérieure évangélique » sous la conduite du pasteur réformé Théodore Monod. Mais vers fin 1875, une aile réformée commence à protester contre une influence erronée des méthodistes. Au sein de l’Église réformée une dispute éclate entre ceux qui sont plutôt proches de ce mouvement de sanctification et ceux qui sont plus libéraux. Finalement, à la fin de cette décennie, l’Église réformée se divise. Les méthodistes se tiennent évidemment plus du côté de l’Église réformée évangélique.

Londres espère toujours qu’une application plus conséquente de la doctrine et discipline méthodiste portera du fruit. Ainsi à partir de 1862, et en dehors des structures de la conférence franco-suisse, Londres finance une œuvre d’évangélisation, conduite par William Gibson, dans les grandes villes et visant la population catholique. L’œuvre est partiellement un succès, mais fortement liée à la personnalité de Gibson et au grand soutien financier britannique ; elle ne peut pas continuer trop longtemps. Dans cette œuvre missionnaire, les catholiques se montrent intéressés au début, mais prennent leur distance par la suite, influencés par l’opposition marquée des prêtres catholiques qui avertissent du danger des méthodistes.[23] Après trois décennies (en 1893), une partie de l’œuvre de Gibson est finalement intégrée à la Conférence annuelle franco-suisse et la partie de la banlieue parisienne est transférée aux Réformés les plus proches.

Dès la création d’une conférence annuelle indépendante de Londres, les méthodistes français pensent aussi évangéliser dans de nouvelles régions. A partir de 1853, des débuts se font en Corse, plus particulièrement à Bastia, et l’œuvre s’affermit à partir de 1859 (début du Second Empire). A cause de la situation catastrophique des finances, la mission doit être abandonnée en 1864. Une vingtaine d’année plus tard (1886), la conférence franco-suisse se lance à nouveau dans une mission, cette fois en envoyant un missionnaire en Kabylie, territoire français en Afrique du Nord. C’est un acte très courageux dans une situation financièrement tendue. Cette mission continue d’être soutenue par la conférence annuelle jusqu’après la première guerre mondiale. Il semble qu’il y ait également un début de soutien à la mission en Côte d’Ivoire, initiée par Londres. Cette mission se poursuivra par une collaboration entre Londres et la Société des Missions évangéliques de Paris (Mission de Paris).

Le point culminant des méthodistes wesleyens en France fut atteint autour de 1870. La conférence franco-suisse comptait alors plus de 180 chapelles et lieux de cultes, 30 pasteurs, plus de 2000 membres adultes et 2500 enfants dans les écoles du dimanche. Malgré des petites poches de réveil par ci par là, le nombre de membres commence à diminuer. La dette sur les bâtiments devient de plus en plus lourde vers la fin du siècle. Dans les années 1890, la société de mission annonce qu’elle arrêtera tout financement après une période de quinze ans. Ainsi, vers la fin du XIXe siècle, les méthodistes wesleyens en France doivent faire face aussi bien à un effectif de membres diminuant qu’à des dettes financières de plus en plus pesantes. Des laïques prennent davantage de responsabilités, pas seulement au niveau local, mais également au niveau de la conférence annuelle avec une parité entre pasteurs et laïques. En 1904, la conférence décide que les délégués laïques peuvent être des femmes. Deux femmes deviendront alors membres laïques de la conférence. Également en 1904, la conférence annuelle, maintenant appelée synode, accepte le projet d’une « Fédération des Églises Protestantes » en France, constituée en 1909 et avant-coureur de l’évolution dans les années 1920.[24]

Encore auparavant en 1900, l’œuvre en Suisse romande est abandonnée et le bâtiment le plus majestueux de toute la Conférence annuelle franco-suisse, la Chapelle du Valentin à Lausanne, est vendu à l’Église méthodiste épiscopale qui y a commencé un travail en langue allemande. Peu de temps après, le travail francophone s’arrête alors à Lausanne. Puis en 1919, la mission en Kabylie est transférée à l’Église méthodiste épiscopale qui est aussi présente en Afrique du Nord. Par la suite, l’activité de la Conférence annuelle des méthodistes « wesleyens » ne continue qu’en France. L’Église méthodiste épiscopale, branche principale du méthodisme américain, est en ascendance. La forte poussée du méthodisme, surtout américain, dans des pays catholiques pourrait être, à mon avis, la raison de deux importants ouvrages catholiques francophones sur Wesley.[25]

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[19] Il est intéressant de noter que S. Samouélian interprète le changement structurel comme constitution d’une église autonome (S. Samouélian, Le Réveil méthodiste, Publications évangéliques méthodistes, Nîmes 1974, p. 25) malgré les protestations contraires parmi les dirigeants méthodistes de l’époque.

[20] Cf. Mille voix… pour Te chanter – A Thousand Tongues to Sing to You, GBGM New York, 2006. L’ouvrage contient des traductions par Ruben Saillens, Mme Olivier, Edouard Monod, C.-L. de Benoit.

[21] Pour les Îles de la Manche W.-J. Handcock a publié Sommaire des lois organiques et règles de discipline des églises méthodistes d’Angleterre (Etienne Barbey Librairie, Guernesey, sans année).

[22] P. Streiff, Die Heiligungsbewegung in Frankreich und im französischen Methodismus. In: Mitteilungen der Studiengemeinschaft für Geschichte der Evangelisch-methodistischen Kirche, Stuttgart 1994/1, pp. 28-43.

[23] Il serait intéressant d’analyser à quel point les changements politiques et légaux en France ont influencé le développement. La guerre franco-allemande en 1870/71 a apporté une destruction massive dans le nord et nord-est de la France jusqu’à Paris. Environ 150'000 personnes sont tuées. La France doit rembourser une lourde dette au vainqueur. Toutefois, la Troisième République (1871-1914) en France réussit des réformes bienvenues : l’école élémentaire obligatoire, gratuite et libre de l’influence de l’Église catholique-romaine ; la liberté de presse et la liberté de réunions publiques. Puis, en 1905, se fait la séparation officielle entre État et Église ce qui crée le laïcisme caractéristique de la France.

[24] Les statuts de la Fédération protestante de France sont adoptés en 1905. Cinq églises décident d’adhérer (les deux Églises réformées, ainsi que les Églises luthérienne, méthodiste et libre). Un Conseil se crée en 1907 et la première Assemblée générale est tenue à Nîmes en 1909. Il semble que les méthodistes n’ont pas joué de rôles importants dans la création ou dans la vie de la Fédération.

[25] (1) Auguste Léger, La Jeunesse de Wesley : L’Angleterre religieuse et les origines du méthodisme au XVIIIe siècle, Paris 1910 ; et (2) Maximin Piette, La Réaction de John Wesley dans l’Évolution du Protestantisme, Bruxelles, 2e éd. revue et augmentée 1923 ; cf. également l’article important en français d’Elie Halévy, La naissance du méthodisme en Angleterre. Dans : Revue de Paris, 1er et 15 août 1906.

3) L’histoire turbulente des différentes branches du méthodisme au XXe siècle


Dans les colonies américaines du XVIIIe siècle, le méthodisme wesleyen est arrivé plus tard que d’autres dénominations. En 1784, suite à l’indépendance des États-Unis et au retrait officiel d’une grande partie des prêtres anglicans, les méthodistes wesleyens se constituent en Église. Ils introduisent la fonction d’évêque et l’Église s’appelle Methodist Episcopal Church, rappelant ses origines dans l’Église anglicane ou Episcopal Church, dont elle veut être la fille à caractère méthodiste. En langue française le nom fut traduit par « Église méthodiste épiscopale » ce qui ne fait plus allusion à la filiation anglicane d’une Église épiscopale (à caractère) méthodiste.

Plusieurs ramifications de l’Église méthodiste épiscopale se sont développées aux États-Unis dont trois ont ouvert une mission francophone en Europe : (1) La branche principale, The Methodist Episcopal Church (Église méthodiste épiscopale) avec une mission en France à partir de 1905 jusqu’aux années 1930 ; (2) The Methodist Episcopal Church South (Église méthodiste épiscopale du Sud), qui s’est séparée de la première en autorisant l’esclavage, est implantée au sud des États-Unis. Cette branche a ouvert une mission en Belgique après la fin de la première guerre mondiale ; (3) The Evangelical Association (« Evangelische Gemeinschaft ») est une ramification de la première ; elle a maintenu la langue allemande parmi les colons allemands aux États-Unis. Cette branche a commencé une mission parmi la population allemande en Europe, y compris en Alsace en 1868. Elle tient à garder la langue allemande et ce n’est qu’après presqu’un siècle d’existence qu’elle commencera à utiliser la langue française. Néanmoins, elle forme en ce temps-là l’épine dorsale de la présence méthodiste en France. Les trois ramifications américaines sont aujourd’hui réunies dans la United Methodist Church (« Église méthodiste unie », en Europe : « Église évangélique méthodiste »).

3.1 La mission des méthodistes épiscopaux de 1905 aux années 1930, en parallèle avec la mission des méthodistes wesleyens


Au tournant vers le XXe siècle, l’Église méthodiste épiscopale veut intensifier sa mission dans les pays catholiques de l’ouest et du sud de l’Europe. La séparation entre État et Église en France en 1905 fut considérée comme un signe favorable pour lancer une mission. Les attentes de succès furent complètement démesurées (un million de personnes évangélisées en vingt-cinq ans) tout comme en Italie. En outre, les responsables de la mission pensaient que la situation du catholicisme en France était comparable à celle de l’Italie où les méthodistes soutenaient les courants politiques libéraux contre la domination traditionnelle de l’Église catholique post Vatican I.

L’œuvre des méthodistes épiscopaux en France est presque inconnue à cause de sa courte durée de seulement trois décennies.[26] Les premiers pasteurs et évangélistes pour la nouvelle initiative viennent des méthodistes d’Italie, de Suisse romande et du Canada, ainsi que de l’Armée du Salut, déjà répandue en France. Les méthodistes épiscopaux s’implantent à l’est du Rhône où les « Wesleyens » ne sont pas présents. L’idée initiale d’atteindre la population ouvrière dans cinq centres urbains échoue, mais les prédicateurs et évangélistes méthodistes sont surpris du bon accueil dans les villages savoyards. En comparaison avec la stagnation parmi les méthodistes britanniques, l’œuvre des méthodistes « américains » se développe plutôt bien quoique loin derrière les illusions des débuts. Le surintendant en charge, un Canadien français, E. Bysshe, est convaincu qu’il faut agir par une « évangélisation agressive » (un terme en vogue à l’époque !) pour former un christianisme profondément spirituel. Au lieu de louer une salle, il utilise des tentes pour 200 à 300 personnes. Le slogan accroché à l’entrée fait allusion à la révolution française : « Nous proclamons / LIBERTÉ par la vérité / ÉGALITÉ sous le salut en Jésus Christ / FRATERNITÉ par l’amour de Dieu et du prochain ».[27] Les responsables de la société de mission aux USA objectent ces formes en dehors des traditions ecclésiales mais Bysshe y tient et trouve une audience attentive. En 1910, cette mission est constituée en Conférence missionnaire ce qui lui donne davantage d’indépendance.

Le président des méthodistes wesleyens apporte une salutation fraternelle à cette première réunion de la Conférence missionnaire et propose une coopération entre les deux branches du méthodisme. Mais leurs stratégies sont trop différentes pour aller de l’avant sérieusement. Les Wesleyens restent attachés à œuvrer dans un environnement protestant, les méthodistes épiscopaux veulent atteindre la population catholique. Quand Bysshe visite la Conférence (synode) des méthodistes wesleyens en 1913, la seule petite note critique de Matthieu Lelièvre est l’espoir exagéré d’une conquête rapide parmi les frères « américains ». En 1914, l’Église méthodiste épiscopale a cinq lieux de cultes en France avec un total de 250 membres adultes et 300 membres probatoires. En France, à l’opposé de la Suisse, elle n’entrera pas dans la Fédération protestante dont les méthodistes wesleyens étaient membres dès le début.

À la suite de la première guerre mondiale, l’engagement de l’Église méthodiste épiscopale en France s’intensifie et s’élargit pour plusieurs raisons. Premièrement, les méthodistes aux USA se sentent interpelés par la résistance et les souffrances des troupes françaises, les pertes de soldats américains en France, le sort de milliers d’orphelins et la dévastation dans le nord de la France. C’est ainsi qu’un immense projet de reconstruction d’une trentaine de villages dans la vallée de la Marne où des soldats américains ont été tués, voit le jour conjointement avec l’Union des Jeunes Gens Chrétiens (YMCA et YWCA). Deuxièmement, l’œuvre d’évangélisation doit reprendre et être intensifiée sous la surintendance du pasteur Bysshe ; elle est couplée à des projets sociaux-diaconaux, surtout pour des orphelins. Troisièmement, la Conférence générale de 1920 (Conférence de l’Église au niveau mondial) a consacré un nombre plus élevé que jamais auparavant d’évêques pour les régions en dehors des États-Unis . Ainsi l’Europe reçoit trois évêques au lieu d’un seul, un pour le nord de l’Europe, un pour le centre et un pour le sud, c’est-à-dire toute l’œuvre autour de la Mer Méditerranée, y compris en Afrique du Nord. Cet évêque pour l’Europe du Sud réside à Paris ![28]

En 1922, l’investissement financier en France dépasse $ 100'000. Seize missionnaires sont envoyés. Toutefois, les difficultés financières de la société de mission méthodiste aux USA au milieu des années vingt ne permettent plus de réaliser les grandes visions. Quelques années plus tard, des bâtiments doivent être liquidés, du personnel renvoyé et l’œuvre drastiquement réduite. Tout cela s’est fait malgré des évolutions positives dans le travail pastoral et une augmentation du soutien local. En 1925, la Conférence de mission en France compte 1’100 membres adultes (un nombre environ égal aux méthodistes wesleyens). En 1929, la Société de mission maintient encore de grands espoirs dans le travail pastoral et d’évangélisation en France. Mais les coupures les plus dramatiques viennent à la suite de la grande crise économique mondiale.

Lors de la crise économique mondiale au début des années trente, les budgets sont drastiquement réduits : de $ 40’000 en 1930 à 2’000 deux ans plus tard. La survie de l’œuvre est remise en question. Une union avec les méthodistes « wesleyens » n’est plus possible, car leur Église-mère veut également se désengager et pousse vers une union avec les Réformés. Un cri d’alarme pour trouver un soutien auprès des amis américains est lancé en 1931, mais la situation s’aggrave à cause du décès subi de l’évêque à Paris. Finalement, les méthodistes américains abandonnent l’œuvre en 1935 et offrent aux Réformés de continuer le travail dans la mesure où ils le veulent et le peuvent. Il ne reste que trois églises locales en Alsace – toujours de langue allemande – qui rejoignent la Conférence annuelle en Suisse. La dernière Conférence missionnaire de France se tient en 1935.

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[26] Copplestone, J. Tremayne, History of Methodist Missions, vol. IV: Twentieth-Century Perspectives, The Methodist Episcopal Church, 1896-1939, The Board of Global Ministries, The United Methodist Church, New York 1973.

[27] Retraduction de la citation anglaise dans Copplestone.

[28] La Conférence générale 1920 élit les trois évêques pour l’Europe avec l’intention que l’Europe reste une seule Conférence centrale mais, après la Conférence générale 1924, trois Conférences centrales sont créées, correspondant chacune à une région épiscopale.

3.2 La Conférence annuelle des méthodistes wesleyens en France


Après la première guerre mondiale, les méthodistes wesleyens ne profitent pas d’une aide au développement comme le font les méthodistes américains en Europe. Au nord, les communautés sont affectées par la guerre. Au sud, la population quitte vallées et villages pour habiter dans les villes. En plus, Londres, voulant définitivement arrêter le soutien financier, poursuit une perspective d’union et pousse les méthodistes à abandonner leur indépendance. Bien que les deux branches méthodistes tiennent une réunion commune en 1921 et décident de faire de même tous les deux ans, aucune autre réunion n’aura lieu. L’union que Londres envisage n’est pas avec les méthodistes américains, mais avec les Réformés.

Contre la volonté de Londres, les méthodistes wesleyens ouvrent à nouveau leur école de théologie à Paris, à ma connaissance sans coopération avec les méthodistes américains. À quelques endroits, des lieux de cultes doivent être fermés, à d’autres de nouvelles chapelles sont construites. La question de la prédication par des femmes est intensément discutée dans les années 1920 mais sans vote favorable. Je suppose que la question était d‘actualité à cause de la présence de femmes importantes au sein du mouvement baptiste français. Lentement, mais continuellement, il y a une perte de membres. Londres n’a ni l’argent ni la patience de continuer son soutien. Et les multiples interventions pour restructurer l’œuvre en France blessent les sentiments d’indépendance des Français. Une vraie coopération avec les méthodistes épiscopaux ne se réalise pas en raison d’une grande différence de culture et d’options de travail. Londres insiste pour que les méthodistes wesleyens s’unissent à une autre Église et préconise clairement une union avec l’Église réformée, d’autant plus que la vision d’une union prend de l’ampleur parmi les Réformés.

Suite à la création d’une Fédération protestante au début du siècle et au choc de la « Grande Guerre », les pasteurs des deux grandes branches de l’Église réformée commencent à coopérer et à former des fédérations régionales. Puis, l’idée d’une véritable union prend l’essor dans les années 1930. Les méthodistes wesleyens restent en retrait. Ceci montre à quel point le synode (nom donné à ce moment à la Conférence annuelle) a évolué d’une idée d’une entité à l’intérieur de l’Église réformée vers celle d’une Église autonome. Finalement en 1939, le synode des méthodistes wesleyens vote en faveur de sa dissolution et de l’union avec les réformés avec 33 voix pour et 7 contre. Mais les méthodistes étaient tellement minoritaires dans la nouvelle Église et peu engagés dans sa constitution que, très tôt, on oublia que le méthodisme faisait partie de cette union.[29] Dans le plan d’union de 1939, la paroisse anglophone à Paris en est exclue et les méthodistes anglais continueront leurs activités jusqu’en 1977. En 1940, les opposants à l’union avec les réformés se constituent en une Église méthodiste indépendante avec sept églises locales et environ 300 membres adultes (parfois appelée « Église évangélique méthodiste » comme son homonyme de la branche américaine). Après de longs pourparlers, cette église indépendante s’est finalement intégrée à l’Église évangélique méthodiste (Église méthodiste unie), en 2004.

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[29] Marc Boegner ne mentionne même plus les méthodistes dans son ouvrage L’exigence œcuménique : Souvenirs et perspectives (Ed. Albin Michel, Paris 1968) à part la petite note en page 77.

3.3 La mission des méthodistes américains de langue allemande en Alsace et sa transition vers la langue française


Une ramification du méthodisme américain a longuement gardé la langue allemande (aux États-Unis et en Europe), la « Evangelische Gemeinschaft ». Cette branche a ouvert une mission en Alsace peu avant la guerre franco-allemande de 1870/71. Après la guerre, l’Alsace devient allemande jusqu’à la fin de la première guerre mondiale. L’« Evangelische Gemeinschaft » s’implante bien en Alsace. Elle poursuivra une présence en langue allemande tout au long des multiples changements d’appartenance étatique. L’évolution vers le français ne se fait que très lentement, à partir des années 1960. La « Evangelische Gemeinschaft » fusionnera avec les méthodistes (anciennement Église méthodiste épiscopale) en 1968 ; les deux branches du méthodisme forment alors l’Église évangélique méthodiste (Église méthodiste unie) avec une dizaine d’églises locales en Alsace et Lorraine, et initialement une seule dans le sud-ouest de la France.
Toutes ces églises locales d’origine alémanique ainsi que celles de langue allemande d’origine méthodiste épiscopale en Suisse romande sont maintenant devenues francophones. Dans le sud-ouest, deux nouvelles églises locales ont été implantées en langue française. En 2004, le synode méthodiste indépendant (les méthodistes wesleyens qui ne se sont pas unis avec les réformés) a intégré l’Église évangélique méthodiste / Église méthodiste unie. Aujourd’hui, celle-ci, unifiant tous les efforts méthodistes antérieurs, compte une vingtaine d’églises locales avec environ 1'200 membres adultes en France et cinq églises locales avec 230 membres adultes en Suisse romande.

3.4 La mission des méthodistes épiscopaux du sud en Belgique après la Grande Guerre


En Belgique, les méthodistes de la branche anglaise organisent des réunions dans les environs de Bruxelles en 1816. On ne sait pas à quelle date, au courant du XIXe siècle, cette œuvre a cessé d’exister et cette branche du méthodisme s’est retirée de Belgique. En 1830, la Belgique devient un royaume indépendant. La religion catholique unifie le pays dont environ 45% sont les Wallons de langue française. Le nouvel État a tout de suite admis la liberté de religion et accordé un soutien financier à toute Église reconnue, ce qui était assez remarquable à l’époque. Mais il faut ajouter que le premier roi était luthérien et le catholicisme en Belgique plutôt de tendance libérale.

Parmi les publications méthodistes éditées à Bruxelles, plusieurs ouvrages ne portent pas de date, mais deux petits catéchismes ont été édités en 1905. Je ne sais pas quelle branche du méthodisme les a créés. Car ce n’est qu’après la première guerre mondiale, que l’Église méthodiste épiscopale du sud décide de venir en aide dans la reconstruction et l’évangélisation en Europe.[30] Elle choisit trois pays sans présence méthodiste, entre autres la Belgique. En 1920, il n’y avait au total que 21 pasteurs protestants et 15 rabbins juifs en Belgique. En 1919, la mission méthodiste commence dans les environs de Bruxelles avec des institutions sociales (maison pour orphelins, écoles pour filles, un hôpital conjointement avec les réformés, puis une station radio, etc.) et la distribution de Bibles et traités chrétiens. Puis, des églises locales sont créées et des membres admis dans l’Église. Les premiers pasteurs viennent de Suisse ou des méthodistes wesleyens de France ou d’Angleterre. Le nombre de membres adultes grandit pour atteindre environ 1'000 membres, puis se stabilise à ce niveau.

L’Église méthodiste épiscopale du sud a également été frappée par la crise économique mondiale des années trente. L’Église-mère veut abandonner l’œuvre en Belgique mais les méthodistes belges tiennent à continuer. Au début du troisième Reich allemand et avant l’invasion de la Belgique par les Allemands, les méthodistes sont engagés dans une organisation inter-protestante d’aide pour les Juifs qui veulent fuir l’Allemagne. Et pendant l’occupation, des enfants juifs sont cachés dans la maison des orphelins.

Après la deuxième guerre mondiale, le méthodisme en Belgique se développe à nouveau grâce au soutien de l’Église-mère en faveur de la reconstruction en Europe. Il y a douze pasteurs francophones, dix flamands et un anglais. Le nombre de membres augmente à presque 3’000. Les méthodistes belges s’engagent dans la fondation d’institutions de formation protestantes. Les projets se réalisent de plus en plus en collaboration avec les autres Églises protestantes (cf. la création de la Faculté de Théologie à Bruxelles). En 1963, un comité de liaison stimule la discussion au sujet d’une éventuelle union faisant suite à la collaboration entre les Églises protestantes. En 1969, les méthodistes belges s’unissent avec l’Église évangélique protestante de Belgique (de tradition luthérienne). Après une deuxième union avec les Réformés, l’Église unie prends le nom « Église Protestante Unie de Belgique ». Elle garde des liens fraternels avec l’Église évangélique méthodiste en étant officiellement une « Église unie affiliée » mais la tradition méthodiste n’y joue pas un rôle prépondérant.

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[30] Robert W. Sledge, « Five Dollars and Myself » : the History of Mission of the Methodist Episcopal Church, South, 1845-1939, GBGM New York, 2005.

3.5 La présence d’autres courants du méthodisme en langue française et le flux migratoire actuel


D’autres courants du méthodisme en langue française existent. Cet aperçu historique se limite aux Églises mentionnées et n’inclut ni l’Armée du Salut[31], issue d’une ramification dans la branche anglaise, ni l’Église du Nazaréen[32], issue d’une ramification dans la branche américaine suite au mouvement de sanctification. La première est fortement implantée en France, la seconde a fait certains efforts, surtout dans la région parisienne, mais s’est aperçue des difficultés pour établir et faire croître des églises locales. L’Église du Nazaréen s’est efforcée de publier des ouvrages en français pendant des décennies, mais sa maison de publication vit actuellement des turbulences.

En complément, il peut être utile de rappeler que la communauté méthodiste francophone la plus grande se trouve en Afrique (surtout dans la République Démocratique du Congo et en Côte d’Ivoire), suivie des Caraïbes. La partie européenne du méthodisme francophone est la plus petite de toutes.

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[31] L’Armée du Salut est issue d’une des ramifications du méthodisme anglais autour de 1865. Elle s’est répandue également en France et en Suisse romande sous la direction énergique d’une des filles du couple Booth, Catherine Booth Clibborn, appelée la « Maréchale ». L’Armée du Salut s’est implantée dans beaucoup de régions où il n’y avait pas d’églises méthodistes et sa croissance a vite dépassé celle des méthodistes.

[32] L’Église du Nazaréen est issue d’une scission à l’intérieur de l’Église méthodiste épiscopale des États-Unis, suite au mouvement de sanctification. Elle a ouvert une mission en Europe continentale au milieu du XXe siècle. En Europe francophone, elle a quelques églises locales dans la région parisienne. Depuis peu, elle est devenue membre du Conseil méthodiste mondial, puis du Conseil méthodiste européen.

4) Vers une célébration de la réforme protestante en 2017 et la communion des églises protestantes (communion de Leuenberg)


À un niveau européen, les églises méthodistes (plus précisément l’Église méthodiste de Bretagne et d’Irlande, les Églises méthodistes autonomes au Portugal et en Italie, ainsi que l’Église méthodiste unie / Église évangélique méthodiste sur le continent européen) se sont joints à la Concorde de Leuenberg pour déclarer officiellement une communion d’Églises avec les Églises de la Réforme protestante. Ensemble, elles forment la communion des Églises protestantes en Europe. Ensemble elles veulent promouvoir le témoignage de l’Évangile en parole et acte. Et ainsi, dans de nombreux pays, les églises méthodistes participeront aux célébrations du cinq centenaire de la Réforme en 2017.

Je termine donc avec une référence à une publication de Bernard Cottret qui retrace, sous un angle différent de Piette, l’évolution du protestantisme. Dans son Histoire de la réforme protestante, XVIe au XVIIIe siècle, Cottret présente l’Allemand Luther, le Français Calvin et l’Anglais Wesley. Il étudie surtout le rapport entre l’Évangile et la Loi chez les trois auteurs en plaçant leur conception dans un contexte historique. Il conclut la partie sur Wesley avec la comparaison suivante :

« Si Luther est l’homme du choc initial, si Calvin demeure par la clarté de son esprit l’inventeur d’une civilisation, Wesley nous permet à son tour de renouveler notre vision de la Réforme. Mal connu en France, en dépit de sa célébrité dans le reste du monde, il opère en sa personne ‘la synthèse de l’éthique protestante de la grâce et de l’éthique, catholique, de la sainteté’. Son témoignage est capital pour comprendre, en enjambant le concile de Trente et les controverses du XVIe siècle, l’unité fondamentale du fait chrétien. … Après Luther, après Calvin, Wesley n’a d’autre souci que de promouvoir une religion du salut qui soit aussi celle de l’authenticité vécue. Et de l’intensité. »

L’ironie publicitaire se dévoile sur la page de couverture du livre. On n’y voit que la peinture de Lucas Cranach le jeune « Groupe de réformateurs » et le titre « Histoire de la réforme protestante », avec un petit sous-titre « XVIe – XVIIIe siècle ». Ce n’est qu’à l’intérieur que le lecteur découvre que Cottret consacre un tiers de son livre à Wesley. C’est un reflet de ce Wesley « mal connu en France » et d’une histoire plus que mouvementée d’implantations d’églises méthodistes en France.

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[33] Bernard Cottret, Histoire de la réforme protestante. Ed. Perrin, 2001.